Page:Jules Mary - Les écumeurs de guerre.djvu/5

Cette page a été validée par deux contributeurs.


prologue


Norbert, fils du comte de Chambry, en garnison à Sedan, était lieutenant de dragons au même régiment que Simon Levaillant, le fils du meunier. Élevés ensemble au lycée de Charleville et voisins de campagne — le château de Clairefontaine et les Moulins-Neufs se touchaient — ils professaient l’un pour l’autre une amitié qui n’était qu’apparente, car l’affection fraternelle de Simon s’était toujours heurtée à l’orgueil de Norbert, et ce dernier, devenu homme, prenait ombrage de l’intimité qui unissait sa sœur, Rolande, au fils du meunier.

Cependant le comte de Chambry et Jean-Louis Levaillant, le maître du moulin, s’estimaient et s’aimaient et le gentilhomme avait accepté d’unir Rolande à Simon. Mais une nouvelle était venue bouleverser l’existence du châtelain et de sa fille. Une lettre de la chancellerie de l’ambassade d’Autriche-Hongrie à Paris avait averti le comte qu’un de ses oncles était mort en Bohême, le laissant pour unique héritier. Les intérêts de cet héritage nécessitaient, en Bohême, la présence immédiate du comte.

Rolande et Simon s’étaient revus la veille même du départ. Leur rencontre avait été attristée par les sombres pressentiments de la jeune fille, pressentiments aggravés par les prédictions d’une vieille nomade :

Vous irez jusqu’aux marches d’un trône… du trône d’un des plus puissants empires de l’Europe. Et de par votre seule volonté, vous trébucherez sur la première marche… Vous ne mourrez pas dans votre lit… Autour de votre mort, il y aura du sang…

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Les sinistres prédictions s’accomplissent.

Un jour, en Autriche, dans le domaine de Medgyar, isolé au milieu des forêts, Rolande est attirée dans un guet-apens et victime d’un crime infâme… Elle repousse les offres merveilleuses de l’archiduc François-Ferdinand et se venge en dérobant, à l’héritier du trône d’Autriche-Hongrie un document politique redoutable.