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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

— Tu as vu ?

— Oui.

— Nous ne nous étions pas trompés…

— Maintenant, un peu de prudence, et les papiers sont à nous…

Ils vidèrent leurs chopes d’eau, sortirent, délièrent leurs vaches et s’en allèrent…

Simon disait à Jean-Louis, qui était ému et tremblant :

— Ma vie et mon honneur sont attachés à ce pli mystérieux que je viens de te remettre… Tu les défendras comme je les aurais défendus moi-même… J’en suis sûr !

— Ta vie, c’est ma vie, et ton honneur, c’est le mien…

— Il s’agit aussi de Rolande.

— Est-ce que je n’aime pas Rolande comme ma fille ?

— Maintenant, père, je n’ai plus qu’un conseil à te donner… Les Allemands sont sur nos talons… Nous avons perdu la première partie, sur la frontière. Où nous arrêterons-nous ? C’est le secret de nos chefs… Sois certain que demain, après-demain, au plus tard, malgré la bataille qui se livre — et qui n’est qu’une bataille d’arrêt — Rethel sera occupé et brûlé… Il est donc impossible que tu restes aux Moulins, pas plus que Barbarat à Marengo, que Rolande et Rose-Lys à Clairefontaine… Il faut fuir, fuir au plus vite, il n’est que temps…

— Fuir… non… Je ne m’y résigne pas.

— Alors, c’est la captivité, peut-être la mort, car les Allemands sont ivres d’orgueil et de cruauté… Ils ne font pas la guerre en soldats, mais en assassins…

— Ils n’arriveront jamais jusqu’ici.

— Ils y seront dans quelques heures… Écoute… c’est leur canon que tu entends… Ce soir, ce sera leurs mitrailleuses… Demain… peut-être cette nuit… tu