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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

Dans un carré de lumière, une masse noire s’est abattue, les bras en croix…

Il se recule, effaré, trébuchant… Celle qu’il a tuée est là… Rolande est dans les bras de son fiancé… Il a frappé au hasard… Mais, pourtant, c’était bien celle-là qu’il voulait atteindre, puisqu’elle apportait le document tragique ?

— Qui donc, alors ?

Il pourrait s’avancer, soulever un coin de ce manteau, s’assurer…

Il n’ose… Il a peur… il court vers le château… Je ne sais quelle horreur l’emplit…

Devant l’Helvetia, des couples se sont reformés avec des tambours et des clairons. Des torches brillent dans la nuit et des lanternes au bout de bâtons et des lanternes vénitiennes qui s’agitent et des lanternes électriques de poche et même des lanternes de bicyclette éclairées à l’acétylène. On a usé de tout pour organiser une retraite aux flambeaux. Et le cortège se met en marche, faisant d’abord le tour du château et de l’hôpital, pendant que des blessés, penchés aux fenêtres, crient vivat et applaudissent.

Dans les salons du château, les danses continuent.

Il reste paralysé. Ses pieds de plomb sont cloués au tapis.

Il cherche au hasard sans vouloir se dire ce qu’il cherche.

Rolande ?

Il sait bien qu’elle n’est pas là puisqu’il vient de l’apercevoir sur la berge.

Rose-Lys ?

Il sait bien qu’elle n’est pas là puisqu’en rentrant au château il vient de l’apercevoir qui, de sa chambre, regardait la fête tumultueuse…

Comment devinerait-il, parmi les femmes et les jeunes filles rieuses, tout à la joie de la délivrance, hors du cauchemar de la guerre et qui s’amusent,