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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

Elle s’apprêtait à rejoindre Simon sur la rive de la Seine.

Chez Sturberg, son parti fut pris aussitôt.

Personne ne le vit s’esquiver, passer par les communs, faire un détour pour éviter les quelques rares danseurs obstinés sous l’averse et revenir vers les pelouses.

Une fois là, lentement, il descendit, s’arrêtant à chaque pas…

La nuit était profonde, d’un noir d’encre, et favorisait son projet sinistre.

En passant dans le vestibule, il avait remarqué, parmi les cannes laissées là, un fort bâton tordu avec une liane festonnant autour, soigneusement sculpté, œuvre patiente d’un poilu.

Il s’en était emparé, à tout hasard.

L’ombre de la nuit était si opaque que Sturberg n’avait pas besoin de se cacher. Il suffisait qu’il se tînt immobile pour faire corps avec la nuit. Pourtant, il se dissimula derrière le tronc d’un marronnier, à la descente des jardins vers la berge. Et là, il attendit Rolande…

Sûr que Rolande viendrait…

Sûr qu’elle possédait le document de mort…

Sûr qu’elle allait le confier à la protection de Levaillant…

La pluie redoubla… Les jardins se vidaient… On entendait, au loin, des cris de femmes qui couraient vers des abris… des appels… des rires… avec des voix d’hommes qui narguaient les trombes d’eau et chantaient Madelon.

Nuit propice à tous les guets-apens, propice au crime…

À peine est-il caché que, morceau de la nuit glissant dans la nuit, voici venir une ombre, enveloppée de la tête aux pieds d’un long manteau sombre, dont le capuchon rabattu protège le visage contre la pluie.