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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

Norbert s’aplatit dans la luzerne et commença son périlleux voyage.

La luzerne longeait un étroit ruisseau, toujours à sec pendant l’été, bordé par-ci par-là de maigres touffes de broussailles hautes comme un balai de bouleau ou de genêts. Il s’y aplatit et rampa sur les mains et les genoux. Le tir de la mitrailleuse continua pendant quelques minutes encore, puis cessa… Norbert leva la tête… À deux cents mètres, le Chêne-Parlant gardait toujours le corps de Simon, plus visible maintenant dans son feuillage déchiqueté… Et Norbert remarqua que le ruisseau, par de nombreux méandres, passait à quelques pas de l’arbre… À part quelques obus qui tombaient loin derrière sur le plateau, silence complet. Ce silence des mitrailleuses était significatif.

— Ils ont envoyé des hommes pour s’emparer du cadavre et le fouiller…

Alors il regretta d’avoir refusé d’être accompagné.

Et il se hâta… Les berges du fossé le protégeaient complètement.

Il n’était plus qu’à quatre ou cinq mètres du chêne, et il arrivait à un coude brusque du ruisseau, près d’un aulne rabougri, déterré et déchiqueté par l’obus dont les éclats avaient enveloppé Simon, lorsqu’il cessa de ramper tout à coup.

Il avait cru entendre un bruit de branches cassées et de pierres déplacées, en avant, pas très loin de lui, de l’autre côté de l’aulne.

Tout bruit avait cessé… Néanmoins, il tira son revolver de l’étui, prêt à tout événement.

Et il reprit sa marche, se haussa sur la berge et examina les alentours…

À ce moment, il étouffa un cri et il sentit un frisson lui passer sur le cœur…

Dans les longues feuilles de l’aulne, une tête large se dressait, coiffée d’un casque à pointe camouflé de