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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

et l’aveu de son complice, il n’avait pas cessé de la surveiller. Elle avait travaillé une partie de la matinée avec Rose-Lys, puis toutes deux — il s’en était assuré — étaient rentrées chez elles. Elles n’en étaient pas ressorties de tout l’après-midi. D’autre part, Simon Levaillant, de son côté, était resté invisible, n’avait pas quitté sa chambre, à l’hôpital.

Ce fut seulement le soir, au bal improvisé dans le château, qu’ils apparurent, sans se rejoindre, obéissant à leur convention secrète de ne point se reconnaître et de se traiter en étrangers.

Cette prudence même était un danger, car Sturberg se dit :

— Ils s’entendent… Déjà ils se sont vus et concertés…

Et avec un frisson de colère et de peur :

— Déjà peut-être il est trop tard !

Deux autres yeux — deux yeux très beaux et très tristes — les surveillaient également, ne perdaient rien des regards que Simon et Rolande pouvaient échanger, ni des gestes par lesquels ils pouvaient se comprendre…

C’était Isabelle, fiévreuse et douloureuse.

Elle vit tout à coup que, après s’être longtemps tenus à l’écart, les deux fiancés essayaient, par d’insensibles et adroites manœuvres, de se rapprocher.

Elle avait quitté le salon où ils se trouvaient, et d’un autre salon voisin, par l’entre-bâillement d’une portière, elle les voyait, le cœur battant, se diriger de son côté…

Ils passèrent sans se regarder…

Mais les lèvres avaient remué, des paroles basses et rapides avaient été prononcées.

Pas si basses qu’Isabelle ne les entendît…

— Je vais aller t’attendre près du pavillon du bord de l’eau…

Et c’était Simon qui avait parlé.