Page:Jules Mary - Les écumeurs de guerre.djvu/193

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
191
LES ÉCUMEURS DE GUERRE

geste qu’elle venait de faire pour ramener contre elle les pans flottants du manteau, et la couleur des cheveux, un instant entrevue, dans l’éclair de ce geste, tout cela, brusquement, venait d’évoquer une image lointaine et chérie… celle de Rolande !…

Et sans réfléchir à ce que sa question avait d’étrange :

— Quelle est cette jeune fille ?

— Une des secrétaires de mon père… depuis très peu de temps chez nous…

Isabelle avait repris son calme… Elle murmura avec un sourire triste :

— Je vous ai demandé pardon…

— Et moi, mademoiselle, je voudrais vous supplier de ne pas me retenir… Votre amitié…

— Je n’ai pas de jalousie, je n’ai pas de rancune, mon cœur ne peut haïr… Vous vivrez toujours ici — fit-elle en appuyant la main sur sa poitrine — tel que vous y avez vécu depuis le jour où je vous ai vu pour la première fois…

C’est ainsi qu’ils se séparèrent.

Mais c’est à peine si l’officier entendit les dernières paroles de la jeune fille.

Et une sorte d’inquiétude vague montait en lui.

En bas, il hésita.

Irait-il vers cette silhouette entrevue et qui disparaissait dans le lointain des arbres ? Ou bien, en haussant les épaules, allait^il s’éloigner ?

Et pendant qu’il se faisait ces réflexions, il marchait vers le fantôme dont certains gestes avaient bouleversé son cœur…

Il ne put le rejoindre. Il le vit qui entrait à la fabrique.

— Mais elle reviendra et suivra le même chemin…

Alors, il prit place sur un banc de pierre et attendit patiemment.