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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

que loin de lui ma vie serait sans but… eh bien ! il entendra, du moins, l’aveu que je lui ferai. »

Mais elle n’osait… Elle le tenta, se reprit… Et Simon s’éveilla au premier soupçon.

Il se demanda s’il n’avait rien fait pour provoquer cet amour.

Sa conscience était sans reproches.

De ce jour-là, il l’évita. Du reste, il devenait plus fort. Il n’avait plus besoin d’être accompagné. L’été était passé. L’automne était venu, et avec l’automne de cette année-là, les victoires décisives. Il se sentait assez robuste pour supporter les fatigues qui l’attendaient. Depuis un mois déjà il avait sollicité du médecin chef de l’Helvétia l’autorisation de quitter l’hôpital. Les camarades, là-bas, se battaient, poursuivaient les Boches. Son régiment, après avoir depuis si longtemps rempli dans les tranchées le rôle des fantassins, était reformé, il le savait, et les dragons, la lance au poing, la carabine ballottant dans le dos, traquaient l’ennemi qui fuyait, par les Ardennes vers ses frontières. Il voulait être de la fête… à l’honneur, et il en avait le droit ayant été depuis si longtemps à la peine.

— Vous le verrez, docteur, disait-il avec désespoir, j’arriverai quand il sera trop tard et qu’il n’y aura plus rien à faire…

— C’est que vous êtes si peu solide encore… J’ai ma responsabilité !

Enfin, il consentit. Mais alors il était question de l’armistice et l’univers entier était suspendu à la miraculeuse nouvelle que l’on attendait.

Ce fut un dimanche, le 10 novembre.

Il devait rejoindre son corps le 15 et 11 avait décidé qu’il passerait à Paris ses quatre jours de liberté, afin de s’enquérir de Rolande. Une partie des Ardennes était évacuée. Grandpré, Vouziers, Rethel n’étaient plus en esclavage. Peut-être pourrait-il apprendre quel avait été, depuis deux années, le sort de sa fiancée, et