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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

plaintes humaines… des branchettes, pas assez lourdes pour rejoindre le sol, demeurent parfois accrochées dans les bras des géants restés debout et forment ainsi des arceaux de verdure sous lesquels rampe la fumée des détonations…

Devant le versant nord et à la pointe ouest de la forêt, c’est la plaine onduleuse, dont le terrain présente comme des remous de vagues figées… Longuement, Simon observe… Les batteries ennemies se rapprochent pour occuper d’autres positions… Encore loin, çà et là, des masses grises mouvantes d’infanterie s’avancent par bonds et disparaissent… Les plis du terrain cachent les mouvements… le nombre. Simon avise, isolé dans la plaine, un arbre énorme, le Chêne-Parlant, en avant de la ferme de Saint-Léger… La ferme est dans un fond verdoyant, et tous ses bâtiments brûlent dans l’or pâle des moissons mûres… partout inclinées par les rafales. Le chêne serait un excellent observatoire… Simon parvient à se glisser jusqu’au pied. Le vieux tronc, fendu à plusieurs reprises par la foudre, offre des excavations où Simon appuie le bout de son brodequin et il s’enlève ainsi jusqu’à la première branche maîtresse. De là il gagne le faite… enveloppé de feuillage, et regarde avec sa jumelle… Alors, il domine, jusqu’à perte de vue, les vagues du sol tourmenté, et il voit… Jusqu’à perte de vue, il voit la terre grouillante de vermine grise… se coulant vers le sud dans une lente progression continue… En avant, les obus continuent de pleuvoir dans le bas et par-ci par-là, dans la plaine. À deux ou trois cents mètres derrière lui, les toits de Saint-Léger s’écroulent avec fracas… Et ravivées soudain, les flammes s’élancent avec une vigueur renouvelée…

Tout à coup, un sifflement rauque, et comme une déchirure du ciel…

En même temps que le sol est ébranlé et que le