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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

— Nous n’avons rien à nous reprocher et rien à craindre…

Le maître entra. Il était grand, lourd et fort, avec des épaules massives.

Il dit d’une voix pleine, avec un accent prononcé :

— Ne vous dérangez pas… Restez assises… Mme Camille m’a parlé de vous… Elle paraît s’intéresser beaucoup à votre sort… Vous connaissez des langues étrangères ?

— L’anglais, dit Rose-Lys… Je le parle couramment.

— Et vous, l’allemand ? m’a-t-on dit, fit Schwartz en se tournant vers Rolande.

— Oui, monsieur… articula faiblement la jeune fille.

Elle était en proie à une émotion qu’elle dissimulait avec peine.

Cet homme, elle l’examinait, pour ainsi dire, de tout son corps et de toute son âme.

Une révolte intime lui criait l’imposture criminelle…

Rien, si ce n’est la carrure et la taille, ne lui rappelait le bandit de Medgyar. Rien non plus ne rappelait un des deux hommes entrevus à la gare de l’Est, un des deux hommes surpris avenue de Saint-Ouen. Si elle ne se trompait pas, celui-là devait être maquillé avec un talent supérieur pour la faire douter ainsi ! C’était surtout les yeux qu’elle interrogeait. Et, les yeux, elle ne les reconnaissait pas. Ceux qu’elle voyait était bridés, restaient mi-clos, avec cent petites rides rouges qui les amincissaient. Et à toute minute, Schwartz se collait sur le nez un binocle légèrement teinté comme s’il eût voulu mettre fin à un examen qui le gênait.

Elle essaya d’apercevoir la cicatrice, à la tempe droite.