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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

Effrayée, Noémie releva la tête,

— Oui…

Qui l’avait donc renseigné, cet homme ?

Il poursuivait :

— Cette condition, c’est qu’il ne faut pas que l’enfant pleure ?

— Oui… le médecin a ordonné… balbutia la vieille. Il a dit que ce serait dangereux… et que, si l’enfant pleurait, cela déterminerait une inflammation soudaine, et que le cher petit pourrait devenir aveugle… Aussi, comme on le dorlote ! Comme on le gâte ! Comme on lui donne tout ce qu’il veut ! Dans la maison, et dans le quartier, c’est à qui l’empêchera de pleurer… Et depuis que nous l’avons recueilli, il n’a pas versé une larme… Je m’en vante… Aussi, le médecin a-t-il déclaré avant-hier que ce n’était plus qu’une affaire de quelques jours… Et il en abuse, le cher petit… Il a compris… Il n’est pas bête… Et, quand il a envie de quelque chose et qu’on refuse, il dit : « Si on ne me le donne pas, je vais pleurer ! » Alors, on le lui donne, et il ne pleure pas… Voilà !

Elle l’embrassa tendrement, le porta sur son lit :

— Fais ton petit dodo, pour te reposer… Ces messieurs vont partir !…

Et à Sturberg :

— Car je suppose que vous savez à quoi vous en tenir, que vous allez me laisser tranquille et que je ne vous reverrai plus ?… Vous n’avez pas le droit de rester ici… On a beau être du pauvre monde, je m’adresserai, s’il le faut, au commissaire de police…

Sturberg lui saisit le poignet, l’attira contre lui d’un coup violent.

Et visage contre visage :

— Écoute, ma vieille, et réfléchis… et vite… car je ne veux pas moisir chez toi plus longtemps… Il ne faut pas que cet enfant pleure…

— Non, fit-elle, redevenue tremblante.