Page:Jules Mary - Les écumeurs de guerre.djvu/110

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
108
LES ÉCUMEURS DE GUERRE

aménagés pour eux. Ils étaient là plus de cinquante convalescents qui, après avoir été bien près de la mort, et après s’y être résignés, reprenaient goût à la vie et s’y réhabituaient. Et d’eux ne venait aucun bruit de paroles. Ils s’entretenaient à voix basse ou même demeuraient silencieux comme s’ils n’avaient pas voulu troubler le repos et le sommeil de ceux qui souffraient encore là-haut.

C’était ces soldats et ces officiers que Nicky Lariss contemplait.

Et son regard s’arrêta longuement sur un officier de dragons, à quatre galons, grand, maigre, au visage jauni par la maladie, aux yeux ternis et abattus et qui, penché dans un fauteuil de paille, les coudes sur les genoux, dessinait des arabesques dans le sable de l’allée du bout de son bâton, la pensée lointaine et la tristesse au front.

Sturberg demanda :

— Qui regardes-tu avec tant d’attention ?

— Simon Levaillant !…

— Rien à craindre de celui-là… il est seulement à surveiller comme les autres… et voilà pourquoi j’ai obtenu, quand je sus qu’on l’avait relevé, du côté de Lassigny, asphyxié et mourant, qu’il fût envoyé à l’Helvetia… Je crois bien qu’il devra une fière chandelle à ma fille, car c’est Isabelle qui l’a sauvé… Après tout, ce garçon nous a gênés un moment, autrefois… tu te rappelles ?… il ne nous gêne plus… mais tu avais des confidences à me faire… du moins à ce que j’ai compris… pourquoi tardes-tu ?

Nicky Lariss ne répondit pas.

Au lieu de regarder les soldats dans les jardins, ses yeux s’étaient relevés et se fixaient maintenant sur une des fenêtres du château.

Là — il le savait — était l’appartement particulier d’Isabelle.

Le rideau de cette fenêtre venait de s’agiter, il