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LA VÉRITÉ SUR LES DEUX PROCÈS CRIMINELS DU MARQUIS DE SADE.



Une notice biographique rédigée par M. Jules Janin avec plus de talent que de vérité, a fait connaître aux gens de bonne compagnie, et même aux femmes, le nom, le caractère et les ouvrages de ce fameux libertin, qui ne pouvait guère prétendre à l’honneur de paraître en public et d’y étaler les souillures inouïes de son imagination, puisque la société, redoutant le contact pestiféré de cet apôtre du crime et de la débauche, l’avait renfermé dans l’oubli d’une prison perpétuelle. Maintenant, grâce au style honnête et brillant de M. Janin, les faits et gestes du marquis de Sade se sont gravés fort décemment dans la mémoire de tout le monde, et l’auteur de ces romans abominables, qu’on n’ose pas nommer, a obtenu la gloire d’Erostrate, une célébrité d’horreur et d’effroi.

Si ses livres n’existaient pas, multipliés sans cesse en secret par une cupidité plus coupable peut-être que la corruption calculée qui les a produits, j’essaierais certainement de défendre le marquis de Sade contre ce qu’il y a d’exagéré, d’aveugle et d’injuste dans une partie des accusations qui le flétrissent ; je parviendrais sans doute à prouver que ce malheureux n’était pas d’abord tel qu’on le représente, un monstre prodigieux de scélératesse, et qu’il ne l’est devenu en vieillissant que pour se venger de la société à laquelle il imputait les malheurs de sa vie ; car il y a deux divisions bien tranchées dans l’existence du marquis de Sade : l’une appartient à l’histoire des mœurs de son temps, l’autre à