Page:Jules Bois - Visions de l'Inde.djvu/79

Cette page a été validée par deux contributeurs.
65
VISIONS DE L’INDE

bourrades, intelligemment données par les employés dans ce tas d’énervés et de fous, éclaircissent le quai. Le cœur vraiment remué, je quitte l’ami que Calcutta me donna, Fuchs, le consul français. Ensemble nous créâmes souvent, après les affaires — car Fuchs est un gros travailleur — dans Calcutta, « la cité aux nuits terribles », un petit coin de France. C’est fini. Nous voici livrés à l’Inde énorme, mon camarade le globe-trotter et moi. Notre wagon est parfait. Nous avons deux larges banquettes où nos « boys » ont fait notre lit comme à l’hôtel. Le cabinet de toilette est douillet, la douche prête. À peine le train s’ébranle que nous nous couchons.

Aux stations importantes, l’œil luisant des « boys » se penche à la portière, questionnant le sommeil des maîtres pour la limonade, la glace, le soda ou le thé. Je fus réveillé vers neuf heures du matin par mon camarade qui sifflait une chanson militaire. On eût dit qu’il marchait à la conquête de l’Inde malgré sa petite taille. En tout cas il « la faisait ». Il avait repassé au fer ses moustaches qui tenaient à la fois de Don Juan et de Matamore. Nous changeâmes à Mogul-Seraï. Nous prîmes pour un quart d’heure les wagons de Oudh-and-Rohilkand Railway. Quelques minutes après, déjà nous apercevions, à l’approche de Kashi, la gare de la ville indigène, se dérouler le long du Gange, dans

4.