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VISIONS DE L’INDE

logique, alla jusqu’au bout des prémisses posées dans son enseignement, dans sa vie, et dans sa mort, Vivekananda, fui mon ami. Pendant plusieurs mois, pour employer une expression indienne, il resta mon « gourou », c’est-à-dire mon maître spirituel.

Le seul moyen de bien connaître une doctrine, surtout lorsqu’il s’agit de l’Orient où la tradition et l’initiation orale l’emportent sur le livre, c’est non seulement de connaître l’homme mais de vivre sa vie. L’Asiatique ne procède pas selon notre méthode ; il n’a pas des élèves mais des disciples, il croit que la science ne doit être transmise qu’à l’heure favorable, comme les secrets du cœur.

J’habitais alors la rue Gazan, dans le parc Montsouris ; le temps s’y écoulait loin de toutes les rumeurs parisiennes, dans le calme et la quasi-solitude avec, comme horizon, cette Suisse minuscule où se couchaient les plus radieux soleils. Vivekananda était venu loger chez moi. Après avoir vaqué à mes affaires, je le retrouvais n’ayant presque pas bougé, mais ayant fumé et médité beaucoup. Nous passions des soirées merveilleuses, la fenêtre ouverte sur le parc, dans la pure ivresse de la métaphysique et du mystère. Ce moine de Shiva, qui avait parcouru la terre entière, propageant son terrible évangile (l’illusion du monde extérieur et de

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