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VISIONS DE L’INDE

les montagnes ; le rajah doit, avec sa suite, rejoindre son château de Mossouri. Je reste à peu près seul, au Guest-House, avec un parent du rajah malade lui-même, bel homme au visage affiné et las ; les plaisirs européens l’ont usé et, dans ce pays hyperbolique, il ne rêve que de notre Monte-Carlo et de son casino…

Je reçois régulièrement les visites de deux médecins indigènes que le Palais m’envoie : l’un est un Hindou silencieux, fatal, aux allures de nécrophore ; l’autre, un musulman vêtu à l’européenne comme le maharajah. Après m’avoir enfoncé dans la bouche un thermomètre qui vient de servir aux pestiférés (je ne l’ai su que depuis, heureusement) il répond, dans un français restreint mais de prononciation pure, à toutes mes questions : « C’est bien, c’est bien ! » Puis il m’interroge, à son tour, sur l’Exposition et sur le Moulin-Rouge. L’intendant du palais, un Allemand, M. Mayer, qui est pour moi plein de sollicitude, s’émeut de mon état et me fait transporter à Lahore presque mourant. Là, j’aurais dû subir la mortelle détresse d’un hôpital où les maladies monstrueuses des natifs affluent, si un noble cœur et un savant éminent, le major Grant, ne m’avait recueilli dans son bengalow.

Le major Grant, délicat amateur de littérature française, fut toujours serviable pour les nôtres ;

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