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VISIONS DE L’INDE

doses de quinine ; mes reins, mon foie, ma gorge brûlaient d’un feu incessant, comme vrillés par des lames incandescentes. Le Maharajah, un vrai Parisien, a fait de la capitale de ses états une sorte de Versailles hindoue dont les palais et les jardins marient la pompe et le confort asiatiques à la sobriété de notre architecture. Tout Européen y reçoit une large et cordiale hospitalité. Le roi venait me voir souvent, ses jolis enfants aussi ; ils parlent ma langue mieux que la leur, grâce à leur institutrice, une Française.

J’entends encore l’aîné, le prince Tika, âgé de huit ans à peine, me vanter notre Paris avec le même enthousiasme que nos enfants, à nous, témoignent pour les palais de leurs contes. Il me confie en tenant ma main très doucement, d’une voix un peu chantante : « Comme il doit y avoir là-bas des bijoux, des chevaux et des armes ! » Ces trois choses composent pour le petit rajah tout le bonheur… Puis il s’inquiète de ma santé ; il me raconte qu’il a eu la fièvre typhoïde l’an passé et que son père en ressentit beaucoup d’effroi. Quand il part, il me laisse le parfum de sa petite âme, charmante comme les fleurs d’ici…

Je vais de mal en pis ; la peste gagne autour de Kapurthala, le soleil est dévorant ; je suis cerné par l’Inde formidable. Le médecin anglais est parti dans