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VISIONS DE L’INDE

Aussi ces jeux qui se continuent depuis l’antiquité la plus lointaine, rappellent-ils non pas le monotone et fade va-et-vient des doigts auquel se réduit notre massage occidental, mais l’embrassement multiple des lutteurs qui, en s’enlevant, se froissent. La variété et la surprise de cette fourbissure étonnent les Européens et, d’après mon guide, elles sont très recherchées par les Américaines de passage qui osent souvent se livrer nues aux frications de ces noirs… Insatiablement pendant ces exercices, aussi réglés qu’un poème parnassien, un esclave répand sur ma chair, alternativement, l’eau chaude, l’eau froide, l’eau tiède. Et je me sens rajeuni et un peu faible pourtant, rompu et souple, défait et remis…

Enfin je vais m’allonger dans une autre salle, sur un divan large et doux. Je suis seul, ou plutôt je crois l’être. Tout autour de moi, une musique subtile et préparatoire fait palpiter les tentures qu’écartent des têtes rieuses n’osant assaillir mon repos. Mais, comme je n’ai pas l’air très rébarbatif, plusieurs se risquent. Elles sont vêtues de « saris » aurores, de loques, teintes on dirait avec l’essence jaune de ces œillets d’Inde dont les guirlandes traînent sur les tombes saintes et le parquet des temples. Cette lueur d’ambre gagne la peau de ces fillettes septentrionales ; quelques-unes réellement viennent de ce Népaul presque aussi fermé que