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VISIONS DE L’INDE

fiques cimes. Le trouble où m’avaient jeté les deux déesses maléfiques, Nanda-Devi et Naina-Devi, à qui sont offerts des sacrifices sanglants au bord du lac attirant et redoutable qui groupe cette station estivale, m’incitait plus encore à visiter ces maisons pures, planant victorieuses très au-dessus de cette eau perfide et charmante. J’y vais à cheval, longeant les précipices, traversant les bazars de la petite ville de délassement. Peu à peu, laissant derrière moi des villas délicieuses, toutes enveloppées d’arbres et de fleurs, séparées les unes des autres par de véritables parcs, je respire un air vivace et sec en des étendues qui semblent inhabitées. Je questionne les passants afin de ne pas m’égarer ; un Anglais ivre me donne des indications incertaines, accompagnées d’injures contre ces « papistes ». Mais un indigène m’accompagne jusqu’à la petite maison neuve, d’où tout Naïni-Tal se déroule avec son lac limpide au fond, et, sur les versants des montagnes, à profusion, les maisons commodes et plaisantes que les Européens, les Anglais surtout, ont dressées en quelques années… Elles mettent un peu de la précieuse joie particulière à l’effort des hommes, au milieu de cette nature opulente et farouche, où seuls régnaient, il y a quarante ans à peine, les fauves.

Un cimetière chrétien s’étend tout près de moi.