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VISIONS DE L’INDE

dont le cadavre a été brûlé à Bénarès, au bord du Gange, entre aussitôt dans le paradisiaque nirvana). En attendant la cérémonie nocturne, les prêtres de ces barques funéraires jouent à s’ondoyer de cette frivole essence ; et les voici tachés de rose, eux dont les mains vont bénir tout à l’heure des chairs carbonisées.


Cette flottille de deuil laisse derrière elle un sillage de joie. Le sang du printemps colore le Gange gris et putride. La vieille déesse aquatique semble rajeunir à cette blessure qu’elle traîne en flaques sur son ventre malpropre et ridé. C’est la sueur amoureuse de Chrisna, le sanguinolent stigmate du printemps éternel qui vivifie la matrice mouvante des Choses.