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VISIONS DE L’INDE

n’a pas le prestige de la force ; mais l’autre, il est l’Anglais, le maître, presque le Dieu… Mon « picturesman » est toujours aussi peu vêtu, ses gestes souples se ramassent comme si, tout à l’heure, il allait, pour la fuite, bondir. Il a apporté le mouchoir inépuisable et il recommence l’offre de sa pacotille avec ses gestes qui incantent et escamotent. « Il avoue qu’il a triché pour la marchandise, dit l’« assistant collector », on peut toujours le mettre en prison. Quant au reste, il nie. »

Et, tout à coup, un autre personnage entre en scène ; où se cachait-il ? Aussi dans ce mouchoir ensorcelé ? Je crois plutôt derrière le « policeman ». C’est un vieillard vêtu on dirait d’une étole ; sa figure est grenue comme une écorce ; son visage, d’où pendent des poils embrouillés et gris, fait penser à une racine récemment arrachée. Et il se casse en multiples « salams », joint les mains comme s’il était devant une de ses divinités. C’est le père du magicien, il a été à la guerre des Cipayes, il a pris le parti des Anglais, il respecte l’autorité britannique comme sa propre mère. Et il fait le grand serment que son fils est innocent. Tous deux sont d’honnêtes et justes marchands. Et il propose de rendre les ivoires exquis, les micas aux peintures charmantes, les miniatures des Reines. « Prenez toujours », me dit en français l’Anglais