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GALERIE DES FEMMES

passion qui fut extrême à sa naissance ; je ne dirai pas comment l’amour se glissa dans le chaste sein de Sophie, comme il s’embellit de ses perfections, comme il s’identifia à toutes ses vertus, comme il sut prêter un nouveau charme à ses devoirs. Je me hâte, en tremblant, d’arriver à l’époque où je n’eus plus un souhait à former sur la terre : c’est en me replaçant en idée au faîte du bonheur que je mesure la profondeur de l’abîme où je suis tombé.

Il y avait un an que j’habitais l’hermitage ; l’amour, l’amitié, la douce philosophie s’unissaient pour enchanter cette solitude où se bornait mon univers. Les jours s’y passaient dans l’uniformité du bonheur. Le matin, dans quelque saison que ce fût, nous nous levions, Sophie et moi, avec le soleil, et pour peu que le temps le permît, nous manquions rarement de faire nos promenades dans les environs de notre demeure. Le lieu où il y avait un malheureux à secourir, une famille à consoler, une bonne action à faire, était toujours celui vers