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GALERIE DES FEMMES

quelque distance des allées où se portait la foule.

« Que je te sais bon gré, disait Charles à son ami, de m’avoir ouvert les yeux sur le piége que me tendait Déidamie ! J’étais pris sans toi. Les poëtes ont eu bien raison de mettre à l’Amour un bandeau sur les yeux ! — Il n’appartient qu’à la jouissance de le détacher. Tu le vois, Charles, il en est de l’amour comme de la peur : on en guérit en s’approchant de l’objet. J’avoue que tu n’avais rien fait pour moi, si tu ne m’eusses porté dans les bras de la belle. Je craignais le sort de Sémélé, et tu m’as fait éprouver celui d’Ixion. — Tu n’es pas le premier qui se soit plaint de trouver sa maîtresse nue. — Ne renonceras-tu jamais à tes insipides calembours ? — Si fait, le jour où tu abjureras tes visions platoniques, où, las de galoper sur la monture de Bellérophon, tu mettras pied à terre pour y vivre avec les femmes telles que le ciel les a créées. — Il n’est pas si facile, mon ami, d’abandonner l’espoir sur lequel tout le bonheur de ma vie est fondé : tu auras beau