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Et ça continue :

1909. — La Comédie-Française va reprendre La Parisienne. Ce sera un événement parisien. Alors Mme Steinheil, de funèbre mémoire, choisit aussi ce jour-là pour déclarer : l’assassin, c’est moi.

En 1908, on a élevé un buste à Henry Becque. Il le disait lui-même de son vivant : « Ils pourront faire tout ce qu’ils voudront : j’aurai un jour ma statue. » Il l’a eue, en effet, inaugurée par Clemenceau, face au métropolitain de la place de Villiers ; mais elle n’a jamais connu le roucoulement des pigeons pacifiques ou l’amitié des moineaux parisiens ; seules les balles tirées lors de la manifestation pour Ferrer l’ont effleurée et la plus récente caresse qu’elle ait reçue a été celle du parc-choc et du radiateur d’un gros camion, qui, bondissant sur le terre-plein, projeta sinistrement ce buste sur la chaussée.

J’en passe. On n’ouvre pas sans appréhension un journal de l’époque. Au fur et à mesure qu’on feuillette le calendrier de la vie de Becque ou des représentations de son œuvre, on sent, inexorable et affreuse, l’Ananké grecque.

En vertu d’une étrange et mystérieuse conjuration, qui semble démoniaque, les hommages les plus déférents et les plus pieux pour sa mémoire tournent à la bouffonnerie.

1923, 1er décembre. — On doit célébrer au Salon