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de pute aire (chanson de Rolland), la pute[1] gent (Li charrois de Nymes). Le patois champenois, le franc-comtois l’ont conservé, et je le retrouve dans le canton de Neufchàtel (Suisse) : de peuta via, de mauvaise vie.

Il est dérivé du latin putidus, puant, dégoûtant. Cependant il n’est pas impossible de le rapprocher du radicale celtique beud ; en irlandais, beud, vice, beudach, méchant, boudag, prostituée ; en breton boutet, même sens que putidus.

Ouéte, ou voite, sale, sordide. C’est le vieux français orde, usité jusqu’au milieu du 16e siècle et d’où nous avons pris ordure. Ce mot orde vient du latin horridus, par la suppression de la syllabe non accentuée. Mais comment ouéte en vient-il aussi ?

Le patois vosgien a cela de caractéristique (et nous en donnerons d’abondantes preuves plus tard) que les syllabes étymologiques ar, er, or, our, ne gardent point cette prononciation ; il suit le procédé des Anglais qui disent dans notre langue jâdin pour jardin ; nous-mêmes nous supprimons l’r dans la plupart des finales en er : aimer, berger, fermier. De plus la voyelle qui précède cet r se transforme dans notre patois en une autre voyelle ou en une diphthongue ; parler, pâlè et pouâlè ; corde, couôde ; perdre,

  1. Dans un de nos vieux noëls patois on connaît ce vers :

    Lè peute gent que vaci.