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néo-latines, et que, si l’on écarte ce que le génie individuel des peuples a modifié ou introduit, on trouve un fonds commun qui a survécu aux révolutions des empires et s’est transmis de bouche en bouche jusqu’à nos jours.[1]

Aussi on a pu prétendre, en exagérant cette idée féconde, que les patois de nos pays de l’Est sont antérieurs à la conquête romaine, que même il est la source du latin, car Rome, née au mi­lieu de populations diverses, gauloises et teutoniques au nord, grecques au sud, a emprunté aux premières un nombre considérable de mots, qu’il n’est pas étonnant de retrouver chez les les descendants des Gaulois primitifs.

Si le mot français table vient directement du latin tabula, celui-ci ne serait-il pas formé du celtique dol ou taol qui se conserve dans dolmen, table de pierre, et dans notre patois vosgien sous la forme taule ou tauye. Est-ce de stabula (latin) ou de stall (allem.) que nos paysans vosgiens ont tiré étau, étable ; de stipula (lat.) ou de stoppel (allem.) qu’ils ont fait htaules, chaumes, éteules ? Dans à la carne, à la carre ou à l’écarre de

  1. « Ce qu’il y a de sûr et ce qu’il est permis d’ad­mirer, c’est que en syncopant certains mots latins, fatum, gelu, picus, nasus, mutus, on trouve qu’ils ne sont que les radicaux romans fa, gel, pik, nas, et mut, affectés de la terminaison latine, et que ces mêmes radicaux romans ne sont eux-mêmes que les radicaux sanscrits fai, jal, pice, nas, mù. » (Charles Nisard).