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Ordonnance n°- 58-1278 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.


Le président du conseil des ministres,
Vu la Constitution, et notamment ses articles 64 et 92,
Le conseil d'Etat entendu,
Le conseil des ministres entendu,
Ordonne:


CHAPITRE Ier


DISPOSITIONS GÉNÉRALES


Art. 1er. ― Le corps judiciaire comprend les magistrats du siège et du parquet de la cour de cassation, des cours d'appel et des tribunaux de première instance, ainsi que les magistrats du cadre de l'administration centrale du ministère de la justice.

Il comprend en outre les auditeurs de justice.

Art. 2. ― La hiérarchie du corps judiciaire comprend deux grades.

A l'intérieur de chaque grade sont établis des échelons d'ancienneté.

Les fonctions exercées par les magistrats de chaque grade sont définies par un règlement d'administration publique.

Art. 3. ― Sont placés hors hiérarchie les magistrats de la cour de cassation, les premiers présidents des cours d'appel et les procureurs généraux près lesdites cours, les présidents de chambre à la cour d'appel de Paris et les avocats généraux près ladite cour, le président du tribunal de la Seine et les avocats généraux près ladite cour, le procureur de la République et les procureurs adjoints près ce tribunal.

Art. 4. ― Les magistrats du siège sont inamovibles.

En conséquence, le magistrat du siège ne peut recevoir, sans son consentement, une affectation nouvelle, même en avancement.

Art. 5. ― Les magistrats du parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l'autorité du garde des sceaux, ministre de la justice. A l'audience, leur parole est libre.

Art. 6. ― Tout magistrat, lors de sa nomination à son premier poste, et avant d'entrer en fonctions, prête serment en ces termes :

« Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder religieusement le secret des délibérations et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat ».

Il ne peut, en aucun cas, être relevé de ce serment.

Le serment est prêté devant la cour d'appel. Toutefois, pour les magistrats directement nommés à la Cour de cassation, il est prêté devant cette juridiction.

L'ancien magistrat prête à nouveau serment lorsqu'il est réintégré.

Art. 7. ― Les magistrats sont installés dans leurs fonctions en audience solennelle de la juridiction à laquelle ils sont nommés.

En cas de nécessité, le magistrat peut être installé par écrit après avoir, s'il y a lieu, prêté serment devant la cour d'appel de sa résidence.

Art. 8. ― L'exercice des fonctions de magistrat est incompatible avec l'exercice de toutes fonctions publiques et de toute autre activité professionnelle ou salariée.

Des dérogations individuelles peuvent toutefois être accordées aux magistrats, par décision des chefs de cour, pour donner des enseignements ressortissant à leur compétence ou pour exercer des fonctions ou activités qui ne seraient pas de nature à porter atteinte à la dignité du magistrat et à son indépendance.

Les magistrats peuvent, sans autorisation préalable, se livrer à des travaux scientifiques, littéraires ou artistiques.

Art. 9. ― L'exercice des fonctions de magistrat est incompatible avec l'exercice d'un mandat au Parlement ou au Conseil économique et social.

Le magistrat dont le conjoint exerce ce mandat sera mis d'office en position de disponibilité.

L'exercice des fonctions de magistrat est également incompatible avec l'exercice d'un mandat de conseiller généralou municipal dans le ressort de la juridiction à laquelle appartient le magistrat.

Nul ne peut être nommé magistrat ni le demeurer dans une juridiction dans le ressort de laquelle il aura exercé, depuis moins de cinq ans, une fonction publique élective visée au présent article ou fait acte de candidature à l'un de ces mandats depuis moins de trois ans.

Toutefois les incompatibilités visées à l'alinéa précédent ne peuvent être opposées aux magistrats à raison de situations antérieures à la publication de la présente ordonnance.

Art. 10. ― Toute délibération politique est interdite au corps judiciaire.

Toute manifestation d'hostilité au principe ou à la forme du Gouvernement de la République est interdite aux magistrats, de même que toute démonstration de nature politique incompatible avec la réserve que leur imposent leurs fonctions.

Est également interdite toute action concertée de nature à arrêter ou entraver le fonctionnement des juridictions.

Art. 11. ― Indépendamment des règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, les magistrats sont protégés contre les menaces, attaques de quelque nature que ce soit, dont ils peuvent être l'objet dans l'exercice ou à l'occasion de leurs fonctions. L'Etat doit réparer le préjudice direct qui en résulte, dans tous les cas non prévus par la législation des pensions.

Art. 12. ― Les magistrats ne peuvent, en dehors de leurs fonctions, être requis pour d'autres services publics que le service militaire.

Toute disposition réglementaire nouvelle prescrivant leur participation aux travaux d'organismes ou de commissions extrajudiciaires sera soumise au contreseing du garde des sceaux.

Aucun magistrat ne peut être affecté à un cabinet ministériel ni être placé en position de détachement s'il n'a accompli quatre années de services effectifs dans le corps judiciaire depuis son entrée dans la magistrature.

Art. 13. ― Les magistrats sont astreints à résider au siège de la juridiction à laquelle ils appartiennent.

Des dérogations exceptionnelles à caractère individuel et provisoire, peuvent être accordées sur avis favorable des chefs de cour par le ministre de la justice.

CHAPITRE II


DES AUDITEURS DE JUSTICE


Art. 14. ― Il est institué un centre national d'études judiciaires.

Ce centre a pour objet d'assurer la formation professionnelle des auditeurs de justice, par des stages et un enseignement appropriés.

Son organisation, les conditions de son fonctionnement, le régile des études dans lesquelles le centre peut coopérer avec les Etats de la Communauté à la formation professionnelle de leurs futurs magistrats.

Art. 15. ― Les auditeurs de justice sont recrutés :

1° Par voie de concours ;

2° Sur titres et le cas échéant sur épreuves dans les conditins fixées à l'article 22.

Art. 16. ― Les candidats à l'auditorat doivent :

1° Etre licenciés en droit ;

2° Etre Français depuis cinq ans au moins à quelque titre que ce soit ;

3° Jouir de leurs droits civiques et être de bonne moralité ;

4° Se trouver en position régulière au regard ddes lois sur le recrutement de l'armée ;