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miner dans une certaine mesure les points de vue théoriques dans question de savoir s’il faut, en matière de libre échange, procéder ou non par la voie des traités.

Mais je ne voudrais pas m’étendre sur un sujet si vaste, et je finirai Messieurs, en vous rappelant une pensée d’Adam Smith.

Il a dit quelque part que les nations pourraient s’élever au plus haut degré de la civilisation, à trois conditions : la première, c’est une bonne administration de la justice. Je crois que nous pouvons, dans cet ordre d’idées, nous rendre hommage à nous-mêmes ; les progrès faits dans cette voie sont aujourd’hui complets. Nous sommes on peut le dire arrivés de ce côté à l’état définitif.

La seconde, c’est la liberté du travail ; nous remplissons cette seconde condition, dont nous étions si loin, il y a cent ans, et sauf les réserves que j’ai faites tout à l’heure sur les tendances des classes ouvrières, nous pouvons compter que le progrès est accompli.

La troisième condition d’Adam Smith, c’est la paix. Cette troisième condition, ne pouvons-nous pas dire qu’elle est dans nos mains et qu’il suffit que vous et nous, les Anglais et les Français, nous ayons une ferme volonté de maintenir la paix pour nous en assurer les bienfaits ? Cette volonté, elle ne nous manque ni aux uns ni aux autres.

Ne nous est-il pas, en conséquence, permis de dire que, remplissant les trois conditions d’Adam Smith, nous marcherons d’un pas sûr et rapide dans les voies du progrès et de la civilisation, et que nous rendrons ainsi, par notre conduite, un hommage de plus en plus éclatant à la mémoire de votre grand économiste ?

Après quelques mots M. Norman qui déclare que, dans son opinion, « les principes de la science tels qu’Adam Smith les a enseignés n’ont jamais été attaqués avec succès » ; en ajoutant qu’il y a des choses bien supérieures à la richesse, telles par exemple que « la défense d’un pays, sa moralité et sa santé physique », la parole est donnée à M. Émile de Laveleye, publiciste, professeur d’économie politique à l’université de Gand.


« Il ne m’appartiendrait peut-être pas, dit M. de Laveleye, de prendre la parole dans une réunion d’hommes aussi distingués, en présence de l’homme d’État illustre qui préside cette réunion et d’un autre homme d’État qui porte dignement le nom du grand économiste français que l’on pourrait appeler le Smith du continent, Jean-Baptiste Say ; mais je désire au nom de mon pays, la Belgique, rendre hommage à Adam Smith, dont les doctrines de libre échange ont été appliquées chez nous pour le plus grand bien du pays. Nulle part, je crois, pas même en Angleterre, ces bienfaits n’ont été plus appréciés, car nos Chambres de commerce de-