Page:Journal des économistes, 1874, SER3, T34, A9.djvu/8

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

straction des petites circonstances perturbatrices, comme en physique, en mécanique, on fait abstraction tout d’abord, sauf à les introduire ensuite dans les formules, de la résistance des milieux, du frottement, etc. Seulement, nous écarterons aussi l’intervention de la monnaie. Pour avoir une idée exacte du mécanisme de la concurrence, il nous a bien fallu l’emprunter à l’un de ces marchés où se font des ventes et des achats de marchandises contre or et argent; mais il est clair que l’intervention de la monnaie, qui est une simplification pratique, est une complication théorique qui doit être écartée. Revenons donc à l’échange direct de blé contre avoine, et, pour commencer, examinons les dispositions à l’enchère des porteurs de l’une et l’autre marchandise.

Prenons, par exemple, un porteur de blé entre tous. Cet individu a du blé, mais il n’a pas d’avoine; il est désireux de garder une certaine quantité de blé pour lui, et disposé à en céder une certaine quantité en échange d’avoine pour ses chevaux. Quant aux quantités respectives qu’il gardera et qu’il cédera, elles dépendront du prix de l’avoine et de la quantité d’avoine qu’il demandera eu égard à son prix. Comment cela ? C’est ce qu’il faut voir. Eh bien ! au prix de zéro (s’il faut donner zéro hectolitre de blé pour avoir 1 hectolitre d’avoine, autrement dit, si l’avoine est gratuite), notre homme demandera de l’avoine à discrétion, c’est-à-dire en quantité suffisante pour tous les chevaux qu’il a et même pour tous ceux qu’il peut avoir dans l’hypothèse où les chevaux ne coûtent rien à nourrir. Aux prix successifs de 1/1000, 1/100, 1/10, 1/5, 1/2… (s’il faut donner 1/1000, 1/100, 1/10, 1/5, 1/2… hectolitre de blé pour avoir 1 hectolitre d’avoine), il réduira de plus en plus sa demande. Aux prix de 1, 2, 5, 10… (s’il faut donner -1, 2, 5, 10… hectolitres de blé pour avoir 1 hectolitre d’avoine), il la réduira encore davantage. Enfin, à un certain prix plus ou moins élevé, au prix de 100, par exemple, (s’il faut donner 100 hectolitres de blé pour avoir 1 hectolitre d’avoine), notre homme ne demandera plus du tout d’avoine, parce que, à ce prix-là, il ne pourra plus ou ne voudra plus nourrir un seul cheval. Il est donc bien exact que, dans tout cela, la demande effective d’avoine diminue toujours au fur et à mesure que le prix augmente ; elle part d’un certain chiffre au prix de zéro, pour aboutir à zéro à un certain prix.

Telles sont les dispositions à l’enchère du premier porteur de blé. Si cet homme va lui-même sur le marché, il peut laisser ses dispositions à l’état virtuel et non effectif, c’est-à-dire ne déterminer sa demande que le prix une fois connu. Mais si, par exemple, il était empêché de se rendre en personne sur le marché, ou si, pour une raison ou pour une autre, il devait donner sa commission à