Page:Journal des économistes, 1862, SER2, T35-36, A9.djvu/143

Cette page a été validée par deux contributeurs.

la valeur du gramme d’or, toutes les transformations deviendraient faciles, puisqu’il suffirait de prendre le tiers d’une somme énoncée en francs pour la traduire en grammes d’or, ou de tripler une somme énoncée en grammes d’or pour retrouver les francs. Nous aurions, d’ailleurs, à considérer qu’en adoptant le gramme d’or comme unité monétaire universelle, on serait logiquement conduit à prendre le mètre pour base générale du système des mesures, en sorte que notre système métrique prévaudrait bientôt partout.

V. — Monnaies auxiliaires. — Il est à peine nécessaire de dire que les monnaies auxiliaires devraient, dans tous les cas, être établies suivant les divisions du système décimal, c’est-à-dire qu’on frapperait des décimes (ou dixièmes du gramme d’or) en argent, valant à peu près trois décimes d’aujourd’hui, et des centimes (ou centièmes du gramme d’or) en cuivre, valant trois de nos centimes actuels. Ces monnaies auxiliaires, qui ne serviraient que pour les appoints et les petites transactions, pourraient avoir une valeur intrinsèque moindre que leur valeur nominale ; elles ne seraient considérées que comme des jetons, destinés à tenir lieu des fractions de l’unité monétaire trop faibles pour être monnayées en or, et n’auraient cours obligatoire que dans des limites très-restreintes : les monnaies de cuivre jusqu’à la valeur d’un gramme d’or, les monnaies d’argent jusqu’à la valeur de dix grammes. L’inconvénient le plus grave que pourrait avoir le choix du gramme d’or comme unité de mesure, ce serait la petitesse de la pièce qui représenterait cette unité. Je ne doute pas que nos ateliers des monnaies ne parvinssent à nous donner un type très-net de la pièce d’un gramme ; mais elle n’aurait guère en poids que les 3/5 de la pièce d’or actuelle de cinq francs, et serait probablement trouvée trop petite pour faire l’office de monnaie usuelle. On remédierait assez facilement à cet inconvénient, dans les transactions journalières, en frappant des pièces d’argent de dix décimes qui circuleraient à l’intérieur comme l’équivalent d’un gramme d’or. Quant aux relations internationales, elles seraient desservies uniquement par la monnaie d’or, seule monnaie universelle, et il est bien évident que pour des relations de cette nature on n’aurait pas besoin de descendre au-dessous de la pièce de deux grammes.

VI. — Conclusions. — Au surplus, il ne peut pas être question, pour le moment, de régler en détail les mesures que nécessiterait un changement de l’unité monétaire. Ce qui importerait d’abord, ce serait d’obtenir que la délibération fût ouverte et que toutes les puissances fissent un effort commun pour arriver à l’uniformité des monnaies. La France, qui a souvent donné aux autres nations le signal de réformes utiles, ne devrait, cette fois-ci encore, céder à personne l’honneur de l’initiative. J’espère, Messieurs les Sénateurs, que vous en jugerez ainsi et que vous voudrez bien, par un renvoi aux ministres compétents, appeler l’attention du gouvernement sur les bons résultats qu’on pourrait attendre de négociations qu’il ouvrirait avec les principales puissances commerçantes, pour chercher de concert les moyens d’établir l’uniformité des monnaies, ou même des mesures en général. Une telle recommandation ne saurait être considérée comme inopportune, dans un moment où les organes du gouvernement lui-même nous font espérer la conclusion