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JOURNAL DES ÉCONOMISTES.

ce ne sont pas des économistes purs. Les véritables économistes s'accordent généralement à dire, d'une part, que le gouvernement doit se borner à garantir la sécurité des citoyen s; d'une autre part, que la liberté du travail et de l'échange doit être, pour tout le reste, entière, absolue.

Mais quelle est la raison d'être de l'exception relative à la sécurité ? Pour quelle raison spéciale la production de la sécurité ne peut-elle être abandonnée à la libre concurrence ? Pourquoi doit-elle être soumise à un autre principe et organisée en vertu d'un autre système ?

Sur ce point, les maîtres de la science se taisent, et M. Dunoyer, qui a clairement signalé l'exception, ne recherche point sur quel motif elle s'appuie.

III.

Nous sommes, en conséquence, amenés à nous demander si cette exception est fondée, et si elle peut l'être aux yeux d'un économiste.

Il répugne à la raison de croire qu'une loi naturelle bien démontrée comporte aucune exception. Une loi naturelle est partout et toujours, ou elle n'est pas. Je ne crois pas, par exemple, que la loi de la gravitation universelle, qui régit le monde physique, se trouve en aucun cas et sur aucun point de l'univers suspendue. Or, je considère les lois économiques comme des lois naturelles, et j'ai autant de foi dans le principe de la division du travail et dans le principe de la liberté du travail et de l'échange que j'en puis avoir dans la loi de la gravitation universelle. Je pense donc que si ces principes peuvent subir des perturbations, en revanche, ils ne comportent aucune exception.

Mais, s'il en est ainsi, la production de la sécurité ne doit pas être soustraite à la loi de la libre concurrence ; et, si elle l'est, la société tout entière en souffre un dommage.

Ou ceci est logique et vrai, ou les principes sur lesquels se fonde la science économique ne sont pas des principes.

IV.

Il nous est donc démontré à priori, à nous qui avons foi dans les principes de la science économique, que l'exception signalée plus haut n'a aucune raison d'être, et que la production de la sécurité doit, comme toute autre, être soumise à la loi de la libre concurrence.

Cette conviction acquise, que nous reste-t-il à faire ? Il nous reste à rechercher comment il se fait que la production de la sécurité ne soit point soumise à la loi de la libre concurrence , comment il se fait qu'elle soit soumise à des principes différents.

Quels sont ces principes ?

Ceux du monopole et du communisme.

Il n'y a pas, dans le monde, un seul établissement de l'industrie de la sécurité, un seul gouvernement qui ne soit basé sur le monopole ou sur le communisme.