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dière a tranché ces questions sur l’avis motivé de la Commission du gouvernement pour les travailleurs. Notre devoir est de protester contre cette décrétomanie dont le résultat final sera une augmentation du prix du pain. Au lieu de faire un code de la boulangerie, une administration libre devrait travailler à la suppression du monopole de la boulangerie, et ne pas imiter l’administration déchue en prenant la responsabilité du prix du pain :

— Un nouveau décret, relatif au marchandage, porte que ce délit sera puni d’une amende de 50 à 100 fr. pour la première fois ; de 100 à 200 fr. en cas de récidive ; et, s’il y avait double récidive, d’un emprisonnement qui pourrait aller de un à six mois ; le produit des amendes sera destiné à secourir les invalides du travail.

Le gouvernement a fait une première faute en abolissant le marchandage ; il la continue en le punissant. Le marchandage est une association libre et volontaire ; il est utile dans une foule de professions. Sous peu, on sera obligé de faire des exceptions ; et, plus tard, on reviendra sur ces mesures inintelligentes. Dans le même, décret, le gouvernement provisoire dit qu’il ne touche pas au travail à la tâche. En vérité, c’est fort heureux.

— M. le ministre provisoire du commerce vient de prendre un arrêté en vertu duquel les professeurs du Conservatoire des arts et métiers, réunis en Commission, sont chargés d’arrêter les bases d’un système général pour l’enseignement des sciences appliquées aux arts industries, dont les cours du Conservatoire formeront le degré supérieur.

Nous nous félicitons de cette mesure déjà sollicitée de M. Cunin-Gridaine, et qui est due en grande partie à l’intelligente initiative de M. Wolowski, professeur de législation industrielle, présidant, cette année, le Conservatoire. Déjà l’ancien Conseil municipal de la ville de Paris avait affaibli le monopole universitaire, en organisant l’école de la rue Neuve-Saint-Laurent, école Colbert sous la monarchie, école Turgot depuis 1848, et l’école François 1er, aujourd’hui école Chaptal. Et ici, qu’il nous soit permis de protester contre ces changements de noms, véritable enfantillage, qui a brouillé sans profit la nomenclature des colléges, des théâtres et des rues.

L’établissement d’une Sorbonne industrielle aura la même portée. Il contribuera à retirer de l’impasse des lettres une partie de cette jeunesse, qui continuerait à s’y atrophier, malgré l’application de l’idée de M. Jean Reynaud, un des conseillers du nouveau ministre, lequel veut diminuer les heures de travail des jeunes lycéens. Il est probable que l’on créera des grades industriels, comme M. Cunin-Gridaine avait déjà créé des grades agricoles. Nous aurons des bacheliers, des licenciés, des docteurs en Conservatoire ! Mais la multiplication des brevets est une étape, pour arriver à la suppression de toutes ces entraves, absolument comme, l’abondance des titres, des décorations a conduit à leur dépréciation.

— Les manufactures de tapis des Gobelins et de Beauvais et la manufacture de Sèvres étaient encore dites, il y a un mois, manufactures royales, c’est-à-dire manufactures entretenues aux frais du public. Aujourd’hui on les appelle nationales, et cette épithète est absolument synonyme de la première ; c’est toujours le budget qui comblera le déficit. Aussi conseillons-nous à M. Bethmont, ministre du commerce, qui vient d’imaginer un Conseil de perfectionnement pour ces manufactures, de créer une Commission pour aviser aux moyens de les faire entrer toutes trois dans le droit commun, et de soulager d’autant le Trésor national.

— Les questions économiques sont souvent abordées dans les cent clubs de Paris. Les propositions les plus diverses sont faites pour les finances ; la crise commerciale et l’organisation future de la société. Ce sont, en général, les plus excentriques qui réussissent le mieux, et que les majorités accueillent avec enthousiasme. Il est rare que les diverses écoles socialistes, et notamment celle de Fourier, n’aient des représentants dans chaque club, et qu’un ou plusieurs de leurs orateurs n’embrouillent les questions les plus simples par l’exposé d’un sentimentalisme nuageux. Pour lutter autant que possible contre ce débordement de systèmes organisants, plusieurs de nos amis ont fondé un club de la Liberté du travail, qui a tenu hier, 31, sa première séance. Une discussion très-animée s’est engagée sur la question général de l’organisation