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de juin qu’un enseignement de plus et non une leçon. Oui, il y a beaucoup de gens qui ont des reproches à se faire ; mais que M. Considérant se borne à parler pour lui.

Ce socialiste trouve que c’est le laissez faire qui est responsable de l’accumulation des populations dans les villes et des effets économiques qui en résultent. C’est un avis comme un autre, mais qui, jusqu’à présent, n’a encore été soutenu que par l’assertion plus que légère de M. Considérant.

— La discussion de la Constitution, la surexcitation du socialisme armé, l’audacieuse formule de M. Proudhon de temps en temps commentée dans le Représentant du Peuple, tout cela a appelé l’attention publique sur le droit de propriété. M. Lamennais, qui avait commencé la publication du Peuple constituant par des articles pleins de sagesse à l’adresse des ouvriers, et qui le finit après avoir singulièrement gâté le bien qu’il avait pu produire, a recherché le fondement de ce droit dans un travail destiné à faire partie de ses études philosophiques. M. Cousin a lu à son tour un Mémoire à l’Académie des sciences morales et politiques. Il nous a semblé que le travail de M. Lamennais se perdait un peu dans le métaphysicisme. M. Cousin est venu apporter aux défenseurs du droit de propriété des arguments tirés de la nature de ses études favorites. Nous ne pouvons qu’applaudir à ses efforts et à ses efforts opportuns. Mais après avoir admiré, comme toujours, la belle forme dont il sait envelopper ses discussions, qu’il nous permette de lui dire qu’il est plus d’accord qu’il ne croit avec les économistes, avec M. Bastiat, pour ne citer que celui qui a écrit le plus récemment sur cette matière. (Voyez son article Propriété et Loi, numéro 80, 15 mai, tome XX, page 171.)

Mais puisque nous avons parlé de la formule qui a commencé la réputation de M. Proudhon, et qui doit lui nuire beaucoup aussi, rappelons un point de l’épisode du Manuel républicain dans la séance de l’Assemblée nationale du 5 juillet.

Dans la séance du 5 juillet, le citoyen Francis Bouvet a accusé en quelque sorte M. Proudhon de plagiat en ce qui touche ces mots : La propriété, c’est le vol. « S’il est vrai, a dit M. Bouvet, en parlant du Manuel édité par le citoyen Carnot, ministre de l’instruction publique, s’il est vrai que ce livre contienne des attaques à la propriété, je le désapprouve. Ce fut une parole bien funeste que celle du philosophe Hobbes, répétée par Diderot et qui a retenti de nos jours, au sein de notre société. Non, citoyens, la propriété n’est pas le vol. »

Nous ne sommes pas assez versé dans la connaissance de Hobbes pour vérifier l’assertion du citoyen Bouvet ; mais nous tenons à avertir M. Proudhon qu’il est accusé de contrefaçon, précisément pour la formule qu’il qualifie quelque part, dans sa Philosophie de la misère, du plus grand mot prononcé dans le règne de Louis-Philippe !

Quand M. Proudhon a soutenu, avec son trop beau talent, que la propriété, c’est le vol, il n’a pas précisément voulu dire que les propriétaires sont des voleurs, et qu’il faut les piller. Il a voulu surtout mettre en désarroi les légistes et pousser des arguments aux économistes. Son Mémoire est des plus savants et ne s’adresse nullement aux masses. Malheureusement on a dit la formule aux classes ouvrières qui l’ont prise au pied de la lettre. Depuis, M. Proudhon n’a rien fait de ce qu’il fallait pour neutraliser la funeste influence des mots qu’il avait prononcés ; il est lui-même devenu dupe de son tour de force ; et, soit fausse honte, soit tout autre sentiment, il s’est trouvé poussé à la proposition