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12 JOURNAL DES ECONOMISTES. ces produits en si grand nombre qui passent sous vos yeux, prenez-en un, n’iroporte lequel; voyez corabien d’individus ont concouru a Je former ,»ceux-ci par leur travail, ceux-la par leurs capitaux, et de- mandez-vous comment ce concours de tant d’efforts s’est op6r6. En r6- ftechissant sur ces seuls faits, vous vous convaincrez sans peine que ce monde industriel, que Ton suppose p!ong6 dans Tanarchie ou le chaos, se signale tousles jours, aucontraire, malgr6 tant der&glements abusifs qui en alt&rent les lois, par des prodiges d’harmonie et d’ordre. Mais comme ces prodiges serenouvellent tous les jours, ils paraissent naturels et simples, on ne les remarque plus. C’est done en partant de cette donn^e, que Tindustrie est livrie a tousles d6sordresde Tanarchie, donnee dontl’erreurest en v6rit6 trop forte, qu’on arrive a vouloir creer pour elle un ordre factice. Par ce qui pr6c£de» on peut d&ja comprendre ce que valent a nos yeux tous les plans fantastiques que Ton imagine a cet effet. Sans examiner ces plans dans leurs details, qui varient d’heure en heure, il y a une consideration decisive a leur opposer, et cette consi- deration, la voici : L’industrie n’a pas besoin qu’on lui impose une organisation de commande, qu’elle n’accepterait- m&me jamais. Elle en a une toute faite, la seule qui r6ponde a sesbesoins et qu’ellesoit en 6tat de sup- porter. Elle la perfectionne, au reste, de siecle en siecle, avec d’au- tant plus d’ardeur et de succes , qu’elle jouit d’une liberty plus grande. Tous les efforts des individus, toutes les combinaisons qu’ils imaginent tendent a cela, m6me sans qu’ils en aient conscience, pourvu que la societe conserve le droit de repousser leurs concep- tions; pourvu qu’ils n’emploient pas Tautorit6 ou la force pour les faire r^ussir. Voila pourquoi toute entrave mise a l’exercice de la li- berty industrielle n’est pas seulement un attentat, mais un d6sordre. Vouloir substituer a cette organisation naturelle, fruit du travail des siecles, ceuvrede Thumanit6 et de Dieu, une organisation artificielle, congue un beau matin dans le cerveau d’un homme, e’est une entre- prise aussi puerile que vaine, et dont il faudrait rire, si, impuissante a remplacer ce qui existe, une telle entreprise ne menagait pas de le troubler. Lorsque les r&glements factices que Ton veut imposer a Tindustrie ne font que contrarier ses lois naturelles, elle les subit, non sans souffrir toutefois de cette contrainte. (Test ce qui arrive, par exemple, par rapport aux monopoles et aux abus que nous avons signals plus haut. Mais quand ces mfimes rSglements vont jusqu’a violer ses lois, elle y rfisiste et les repousse, non pas ouvertement, il est vrai, mais en 6chappant k leur application. C’est ce qui arrive toutes les fois qu’on veut fausser le prix des choses; parexemple, dans le cas d’une alte- ration des monnaies, ou de retablissement d’un maximum, comme en 1793, ou d’une fixation arbitraire du taux des salaires; toutes