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valeur scientifique de ce mot Richesse, a cm que quand les livres elémentaires disent que l’économie est la science de la richesse t cela signifie qu’elle est la science des riches! En vérite, le quiproquo est assez piquant. Faut-il donc apprendre au redacteur du Monileur que ces mots, « science de la richesse », sont une formule abrégee pour dire — science qui etudie et enseigne comment la richesse publique et privée, grande ou petite , est et doitfttre produite, échangée, repartie et consommee dans le corps social tout entier pour l'aisance et le bonheur de toutes les classes, et notamment de celles qui sont en ce monde les plus nombreuses et les plus pauvres, de celles qui n’ont pour toute propria que le travail? Les hommes eminents qui ont ibnd^cette science etaient des democrates d’une trempe supérieure, et ils n’ont pu la fonder qu’en creusant la veritable notion de la proprieté , de la liberte, de l'egalité d’ou decoule celle de la fraternité. En medilant leurs ouvrages, les membres de la haute Commission et le redacteur du Monileur verront que, bien avant la Revolution de 1848, ces philosophes s’etaient preoccup6s de l'analyse des procedes capables d’accroitre les fruits du travail, d’en op6rer la distribution la plus equitable et la plus universelle. Ils verront , en etudiant l'ancienne économie politique ? quelle est beaucoup plus democratique, plus liberale, plus vraie que la nouvelle. L’ancienne combat les monopoles, les abus et les privileges ; elle n’a cesse de défendre l’interêt de tous contre les manoeuvres de quelques-uns ; et si par nouvelle on entend (’organisation du travail, nous renverrons, pour ne pas nous répéter, aux critiques récemment faites par M. de Lamartine lui-même, ou par M. Lamennais, lesquels n’appartiennent assur&nent pas a l'école economique qui gêne tant les faiseurs de projets. M. Lamennais disait l’année derniere, a pareille epoque, dans une lettre adressée au National 1 , en parlant des écoles socialistes :

« Je n’en connais pas une seule qui, plus ou moins directement, n’arrive a cette conclusion, que I’ appropriation personnelle est la cause du mal auquel on cherche a rem^dier; qu’en consequence la propri6te doit cesser d’etre individuelle ; quelle doit 6trc concentree exclusivement dans les mains de l'Etat, qui, possesseur unique des instruments de travail, organisera le travail, m&ne en distribuant a chacun la fonction sp^ciale et rigoureusement obligatoire pour lui, a laquelle on I’aura jugé propre, et distribuera, selon certaines regies, sur lesquelles on diflere d’ailleurs, le fruit du labeur commun.

« II m’est evident que la realisation d’un pareil systeme conduirait les peuples a une servitude telle que le monde n’en a point encore vu, reduirait l'homme a n’fitre qu’une machine, un pur outil, l’abaisse-

Voir t. XVII, p. 110, numero 65, avril 1847, Voir a la Chromque de ce numero une adresse du meme ecrivain aux ouvriers.