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L'impression photographique obtenue est donc due à un rayonnement pénétrant. Pour en déterminer la nature et savoir si ce rayonnement était issu de la source ou excité dans le métal sous l'effet du bombardement des particules alpha, j'ai pris des solutions de polonium semblables aux précédentes auxquelles j'ai ajouté une petite quantité de solution de radium +E (l'intensité du rayonnement beta du Ra E était de quelques millièmes d'unité E. S. pour une activité alpha de l'ordre de l'unité). Les impressions obtenues se sont montrées tout à fait semblables aux précédentes, et la durée de pose nécessaire pour avoir un effet photographique d'une certaine intensité est en raison inverse de l'activité beta de la source. Les solutions considérées comme pures d'après les mesures électrométriques, contiennent donc encore des traces d'impuretés émettant un rayonnement pénétrant non décelable à l'électroscope, mais que peut déceler la plaque photographique beaucoup plus sensible en raison de l'addition des effets pendant une pose suffisamment longue. Pour obtenir une certitude, j'ai fait la contre-épreuve suivante : j'ai repris les solutions d'abord utilisées et je les ai purifiées en recommençant deux ou trois fois de suite l'extraction du polonium par le même procédé : la durée de pose nécessaire pour obtenir une impression photographique de même intensité croit progressivement ; avec les solutions les plus pures que j'ai utilisées, je n'ai pas obtenu d'impression par une pose de sept jours.

2. — Toutefois, un certain temps après le dépôt de la substance active, apparaît un autre phénomène, qui se superpose au précédent dans le cas où la solution employée n'était pas tout à fait pure : on obtient des impressions d'aspect très différent, discontinu, en forme de réseau (figure 1) d'abord à peine indiqué, puis de plus en plus net et intense. Il s'agit, dans ce cas, d'une action due à des particules alpha : en effet, une lame qui ne présentait dès après le dépôt ni scintillations, ni courant d'ionisation au verso, manifeste ces deux phénomènes au bout d'un temps variable avec l'épaisseur de la lame et l'intensité de la source. Une faible partie de la substance active a donc pénétré dans le métal, assez profondément pour se trouver à une distance de l'autre face inférieure au parcours du polonium dans le plomb. L'ensemble du réseau présente encore la forme générale de l'impression donnée directement par la source ; de plus, les scintillations observées au verso, très rares en d'autres points, sont assez abondantes à l'endroit correspondant au dépôt. On peut donc affirmer que le polonium a bien traversé l'épaisseur de la feuille de métal, et n'est pas simplement arrivé sur la face opposée à la source en cheminant le long de la surface, ou encore par contamination, selon les suppositions émises par Mlle Rona et M. Schmidt pour expliquer les résultats des expériences de Mlle Maracineanu. Je dois mentionner que, parmi les photographies que j'ai obtenues au verso des lames étudiées, un certain nombre mettent en évidence le phénomène particulier des groupements d'atomes signalé par Mlle Chamié[1] et spécialement étudié par elle dans diverses autres conditions (figures 4 et 5).

3. — L'épaisseur des lames étudiées a varié de 4/100 à 1/10 mm, et l'intensité des sources, de quelques dixièmes d'unité à quelques unités E. S. Le phénomène est d'autant plus rapide que la lame est plus mince et la source plus forte, sans qu'il soit possible d'observer une proportionnalité. Avec les lames les plus minces, on l'obtient dès le lendemain ; avec celles de 0,07 à 0,10 mm, le réseau, à peine indiqué quelques jours après le dépôt, devient très net et beaucoup plus intense au bout de quelques semaines. Les temps de pose utilisés ont varié de 18 heures à cinq jours. Une intensité de 2 ou 3 U. E. S. convient très bien pour les lames de 0,07 ou 0,08 mm, et donne de bonnes photographies par des poses de 18 heures, deux ou trois semaines après le dépôt de polonium.

  1. Mlle Catherine CHAMIE, C. R. t. 184 (1927), p. 1243 ; C. R., t. 185 (1927), p. 776 et 1277 ; C. R., t. 186 (1928), p. 1838 ; J. Phys., t. 10 (1929), p. 44.