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journal de marie lenéru

cela doit être ainsi. Rien d’imaginaire dans mon cas.

Je pourrai être triste jusqu’à la mort, mais je ne serai jamais pessimiste. Les malheurs ne seraient pas si sensibles, si ce qu’ils suppriment ne valait rien.

Les misères de ce monde révèlent Dieu plus qu’elles ne le nient. Est-ce que la nature aurait cette justesse de visée, cette volonté d’intention, cette suite dans les idées ? Oui, on peut dire tout cela… oratoirement.


15 août.

Oh ! mes idées de morale aussi sont indépendantes, ce n’est pas la charité qui se charge de nous développer le sens critique…

Indépendant ? Il nous faut le courage de l’être puisqu’on nous veut sincère.

Vouloir tout ce qu’on fait, savoir tout ce qu’on veut. Mais les indépendants dégoûtent de l’indépendance. Je suis trop intelligente pour être jamais « une révoltée ». Ah ! ces consciences romantiques, séduites par l’étiquette et fières de « se révolter » avec une banalité écœurante.


Brest, 4 novembre 1896.

« Ne désire rien pour toi-même, ne cherche rien, ne te trouble pas et n’envie rien à personne. L’avenir doit te rester inconnu, mais il faut que cet avenir te trouve prêt à tout. »