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XXXIII
PRÉFACE

bien habillée (quoique je m’en occupe un peu trop à mon avis) mais il me semble qu’à mon âge on peut disposer de plus de liberté en ce qui vous concerne.

« La sincérité et la charité sont moins difficiles ; ce n’est pas que je sois charitable et très très franche, en ce moment je n’énumère pas mes qualités mais mes dispositions ; ainsi il m’arrive des mensonges légers il est vrai mais fréquents. Quant à la charité j’en manque énormément extérieurement car intérieurement je n’en veux à personne et j’aime mon prochain, mais ce qui me semble en eux des ridicules ne m’échappe pas et j’ai toutes les peines du monde à ne pas le laisser voir : cela c’est un ridicule à moi.

« La paresse, le défaut que je méprise le plus et que je n’avais pas naturellement, est pourtant celui que j’ai le plus à combattre, peut-être à cause de ma surdité ce qui vous éteint pas mal et cependant la faute est loin d’être toute à mes oreilles, car j’ai mes jours. C’est une honte ! surtout le temps que je mets à m’habiller, je flâne constamment.

« Je ne puis pas dire que je sois réellement gourmande, car la mortification sur les desserts ne me coûte guère ; c’est-à-dire qu’une fois que je suis résolue à m’en passer, je n’en ai nulle envie, mais je suis un certain temps à m’y décider et il ne faut pas croire que je me mortifie souvent ! Très rarement au contraire ! »