Page:Journal de Marie Lenéru.djvu/176

Cette page a été validée par deux contributeurs.
118
JOURNAL DE MARIE LENÉRU

tous les retours sont pour le monde ». J’ai besoin des autres, je ne voudrais rien retrancher de ce qui peut diversifier l’existence, je ne sais ce que j’aime le mieux des vanités ou des vérités, mais il faut aimer les êtres au moins comme on aime les choses. On ne peut nier qu’ils ajoutent à notre sensation de la vie et l’orgueil de Platon est moins dupe que l’orgueil de Diogène.

Enfin je tiens aux autres parce que j’ai peur, peur du néant qui n’est pas plus au delà de la mort, que l’éternité n’est au delà du temps.


Lundi 1er  juin.

Si l’on pouvait vaincre ce que chaque mouvement, même déterminé, contient de nonchalance, si l’on pouvait délester chaque minute, même fiévreuse, de ses millièmes d’oisiveté… ce serait l’éternité en profondeur.

Je suis poursuivie par cette idée de perfectionner l’instant, de débarrasser chaque particule d’existence de cette loi de pesanteur, qui fait que la paresse « usurpe sur toutes nos actions » nos pensées, nos vibrations, nos ondulations de toutes sortes et que, d’un bout à l’autre, nous dormons la vie !

L’incurie humaine… ce qui m’aura le plus étonnée