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JOURNAL DE MARIE LENÉRU


1er  mai.

Les lettres de Renan à sa sœur, si elles n’étaient pas de lui, ce serait bien ennuyeux. Il a beau dire, ce n’est pas saint Sulpice qui lui a appris à écrire.

Il est impossible de tomber sur des lettres plus séminaristes ! Quand il parle à Henriette de projets d’avenir et de réunions : Tu en étais toujours partie intégrante !.. Quand on sort du XVIIIe siècle et du prince de Ligne ! Et comme ces malheureux devaient s’ennuyer mutuellement, Henriette n’a pas un récit de Pologne. Ils se répètent à satiété.

Il est intéressant de rapprocher les impressions de séminaire de celles de Lacordaire : « Vous ne savez pas un de mes enchantements, c’est de recommencer une jeunesse. Je me plais à me faire aimer, à conserver, dans un séminaire, quelque chose de l’aménité du monde. » Ceci est de Lacordaire, bien entendu. Il faut charmer pour être charmé.


3 mai.

Aujourd’hui j’ai vu la surface de l’eau, l’horizontalité de la rade. Le château reprend son air de pierre, c’est comme si le tact était rendu à mes yeux.

Je croyais si bien me souvenir ! En dix ans j’ai tout oublié… Comme je sens que j’ai été morte, je