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Paris, et fut prevost comme devant[1], et fist tant que on cria parmy Parys que on abandonnoit les Armignaz, et qui pouroit les tuer si les tuast et prinst leurs biens[2]. Si [y alla moult de gens qui plusieurs foys leur] firent dommaige et, par especial, compaignons de villaige, que on nommoit brigans[3], qui s’assemblèrent et firent du mal assez soubz l’ombre de tuer les Armignaz.

17. En ce temps prindrent ceulx de Paris chapperons de drap pers et la croix Saint Andrieu, ou millieu ung escu à la fleur de lis[4] ; et en maint de quinze jours avoit à Paris cent milliers, que hommes que enfens, signez devant et derrière deladicte croix, car nul n’yssoit de Paris qui ne l’avoit.

18. Item, le xiiie jour d’octobre, prindrent les Arminaz le pont de Sainct-Cloud par ung faulx traistre qui en estoit cappitaine, que on nommoit Colinet de Pisex[5], qui leur vendy et livra, et

  1. Pierre des Essarts fut remis en possession de la prévôté de Paris le 11 septembre 1411, Bruneau de Saint-Clair ayant résigné son office entre les mains du roi ou de son grand conseil (Arch. nat., Xia 1479, fil. 172 v°).
  2. En vertu de lettres du 3 octobre 1411, par lesquelles Charles VI déclarait rebelles et désobéissants les princes et seigneurs d’Orléans, Bourbon, Alençon, Armagnac, Albret, et les abandonnait corps et biens ; ces lettres, suivies le 14 octobre d’un mandement au prévôt de Paris pour la convocation de l’arrière-ban, sont insérées dans le ier volume des Ordonnances du Parlement (Arch. nat., Xia 8602, fol. 286, 288). Une commission spéciale fut instituée le 7 mai 1412 pour la vente des biens confisqués après la forfaiture des princes du sang : elle se composait du sire de Blaru, d’Eustache de l’Aître, de Nicole d’Orgemont et de Guillaume le Clerc (Arch. nat., JJ 166, fol. 112 v°). Une ordonnance de novembre 1412 confirma les ventes et cessions de biens faites par ces commissaires royaux (Ibid., JJ 167, fol. 57. Ordonnances des rois de France, t. X, p. 34).
  3. Voy. dans le Religieux de Saint-Denis (t. IV, p. 455) le chapitre consacré au soulèvement des paysans qui, désignés sous le nom de « brigands », exploitèrent les grands chemins et rançonnèrent indistinctement tous les partis.
  4. On voit par un compte de la recette de Paris pour 1412, publié en extrait par Sauval (t. III, p. 266), qu’en suite d’une commission du 9 octobre 1411, le prévôt de Paris donna ordre aux baillis, prévôts et capitaines royaux de faire prendre pour enseignes, à tous vassaux et sujets du roi portans armes, « le signe du sautoir blanc et de la fleur de lis d’or sur l’écu d’azur ».
  5. La trahison de Colinet de Puiseux, que taisent plusieurs chroniqueurs, tels que Juvénal des Ursins et l’auteur de la Chronique des Cordeliers, est attestée par des textes quasi officiels. Voici en quels termes le greffier du Parlement, N. de Baye, en parle dans son journal : « lequel pont de St-Cloud avoit livré un appellé Colinet de Puiseux qui en avoit