Page:Journal d’un bourgeois de Paris 1405-1449.djvu/64

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mun de Paris qu’il gardoit si bien, car aucuns et le plus de la bende[1] cuidoient de certain que on deust piller Paris. Et tout le mal qui ce faisoit de delà, chascun disoit que ce faisoit le conte d’Armignac, tant estoit de malle voulenté plain, et pour certain on avoit autant de pitié de tuer ces gens comme de chiens ; et quelconques estoit tué de delà, on disoit : « C’est un Armignac[2] », car ledit conte estoit tenu pour très cruel homme et tirant et sans pitié. Et certain, ceulx de ladite bende eussent fait du mal plus largement, ce ne fust le froit et la famine qui les fist traictier comme

une chose non achevée, comme pour en charger arbitres. Et fut fait environ le vi jour de novembre mil iiii

et x[3], et s’en alla chascun à sa terre jusques à ce que on les mandast, et qui a perdu si a perdu ; mais le royaulme de France ne recouvra la perte et le dommaige qu’ilz firent en vingt ans ensuivant, tant viengne bien.

14. Et en ce temps fut la rivière de Saine si petite, car oncques on ne la vit à la sainct Jehan d’esté plus petite qu’elle estoit à la sainct Thomas devant Noël ; et neantmoins, par la grâce de Dieu, on avoit à Paris en ce temps, environ cinq sepmaines après l’allée

    et place de Guillaume de Tignonville, fut reçu le 5 mai suivant et prêta serment en séance du Parlement (Arch. nat., Xia 1479, fol. 26) ; ses lettres d’institution, insérées au Livre rouge vieil du Châtelet (Arch. nat., Y2, fol. 255), le qualifient maître de l’hôtel du roi et capitaine de la ville de Paris. À la suite du traité de Bicêtre conclu entre les princes le 2 novembre 1410, Des Essarts dut se démettre de sa charge et fut remplacé le 8 novembre par Bruneau de Saint-Clair qui remplit les fonctions de prévôt jusqu’au 12 septembre 1411 ; après sa disgrâce, il se retira avec le duc de Bourgogne en Flandre. (Chronique des Cordeliers, édit. Douët d’Arcq, p. 205.)

  1. Les mss. portent ici un « qui » inutile au sens.
  2. Si à cette époque les partisans du duc d’Orléans recevaient la qualification méprisante d’ « Armagnac », associée souvent aux mots de « traître, larron, coupaut » (Arch. nat., JJ 171, fol. 231, et Zia 5, fol. 248 r°), ils appliquaient à leur tour aux Bourguignons l’appellation injurieuse de « maillet » que l’on considérait comme flétrissante : c’est ainsi qu’un notaire du roi, traité de « mailletus, mastinus, proditor, latro », fit infliger à l’auteur de ces propos une condamnation à 30 livres d’amende et 30 livres de dommages-intérêts avec réparation honorable (Arch. nat., Xia 56, fol. 369, v°). En 1412, les habitants de Soissons tenant le parti du duc de Bourgogne se virent qualifiés de « faulx vuillains maallès » (Arch. nat., X2a 17, 30 juin).
  3. Il faut voir dans le récit assez obscur de notre chroniqueur une allusion au départ des princes stipulé par le traité de Bicêtre.