tière des Innocents. Ici encore se dévoile l’individualité du chanoine de Saint-Germain-l’Auxerrois. Il semble que l’auteur du Journal, lorsqu’il nous parle de la recluse, soit parfaitement au courant de ce qui la concerne.
Effectivement, la nouvelle recluse des Innocents n’était pas une étrangère pour le doyen de Saint-Germain-l’Auxerrois, puisque dans la séance capitulaire tenue le 2 août 1442, Jeannette la Verrière fit demander par Jean Boileau, curé de l’église de Sainte-Croix en la Cité, la permission de construire dans le cimetière des Innocents, près de l’église, un réduit où elle se proposait de finir ses jours dans la prière. Les chanoines appelés à délibérer sur cette requête prirent en considération le pieux dessein de Jeanne la Verrière et accordèrent l’autorisation nécessaire[1]. Il n’est donc pas étonnant que, dans son Journal, notre chanoine ait mentionné la cérémonie imposante par laquelle la recluse était retranchée du nombre des vivants.
Jean Chuffart, si l’on se place à un point de vue personnel, voyait d’un œil sympathique ces pauvres cloîtrées ; il en donna un témoignage l’année même de sa mort. Dans l’expression de ses dernières volontés, il n’eut garde d’oublier les recluses de Paris qui étaient alors au nombre de trois, deux aux Innocents et une à Sainte-Marie l’Égyptienne, et laissa à chacune d’elles trois aunes de drap noir pour s’en faire une robe ou un manteau[2].
Le dépouillement attentif des registres capitulaires de Saint-Germain-l’Auxerrois nous révèle une particularité intéressante qui tendrait une fois de plus à confirmer l’attribution du Journal parisien au chanoine Jean Chuffart. Voici ce dont il s’agit. Le chroniqueur racontant l’entrée du connétable de Richemont à Paris en 1436 nous donne des détails d’une précision extraordinaire et que l’on ne rencontre nulle part ailleurs ; ainsi aucun texte contemporain ne men-
- ↑ « Licentia edificandi reclusagium in cimeterio Innocentium Johannete la Verrière. Anno Domini mccccxlii, die secunda mensis augusti. In eodem capitulo, pro parte Johannete la Veriere extitit dominis humiliter supplicatum per dominum Johannem Boyleau, curatum Se Crucis in Civitate, quod cum ipsa mota devocione intenderet vitam suam finire in reclusagio seu loco clauso, et locus valde aptus ad hoc apparuerat sibi fiendus in cimiterio Innocentium prope ecclesiam ejusdem loci, in quodam loco ubi est jardinum, quod placeret ipsis dominis dare licentiam edificandi ibidem aliquam parvum domum ubi ipsa posset habitare et in reclusagio vivere, et ipsa oraret Deum pro ipsis. Quiquidem domini, habita prius deliberacione super requesta hujusmodi, nolentes impedire devocionem dicte Johannete, ymo pocius eam ad meliorem vitam dirigere, sibi de gratia speciali hoc conccsserunt licentiam faciendi habitacionem ad hoc aptam sive opportunam dederunt, » (Arch. nat., LL 498, fol. 108 Vo.)
- ↑ Testament de Jean Chuftart, Arch. nat., S 851.