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Voilà donc en quoi se résume, pour la période postérieure à 1418, le seul et unique fait relatif, non à l’église, mais au cimetière de Saint-Nicolas. En continuant à raisonner dans l’hypothèse qui permettrait de rattacher à Jean Beaurigout le Journal parisien, l’on est involontairement frappé du profond silence que garde ce curé dans le cours de son existence sur tout ce qui peut toucher son église. Comment s’expliquer, par exemple, que dans un laps de temps qui comprend plus de vingt années, il n’ait pas trouvé une particularité digne de fixer son attention et de prendre place dans un memento composé de notes journalières, lorsqu’une grande partie de la chronique n’est remplie que de ces incidents de la vie quotidienne, de ces menus détails auxquels se complaît l’auteur ? Il est vraiment surprenant que l’anonyme auquel nous devons le Journal parisien, s’il doit s’identifier avec le curé de Saint-Nicolas-des-Champs, ne souffle mot de la réédification de son église, qui eut lieu en 1420, et qu’il ne parle point d’une transaction conclue le 25 janvier 1421, entre le curé joint aux marguilliers de Saint-Nicolas d’une part, et les religieux de Saint-Martin-des-Champs d’autre part, au sujet de la construction d’un nouveau presbytère attenant à l’église[1]. Si Jean Beaurigout, curé de Saint-Nicolas-des-Champs de 1419 à 1440 (au moins), est bien l’auteur de notre Journal, comment se fait-il que sa chronique ne renferme aucune allusion à un fait assez curieux qui se passa au mois de janvier 1439, et qui dut fortement émouvoir la personne du curé de Saint-Nicolas, à raison du scandale causé dans son église ? Voici de quoi il est question. Vers le milieu de janvier 1483, un libelle diffamatoire visant le prieur de Saint-Martin-des-Champs et plusieurs autres personnages fut placardé dans l’église de Saint-Nicolas ; l’officialité, saisie de l’affaire, lança un monitoire contre les auteurs inconnus de ce méfait.

Le dimanche 8 février, un sermon fut prêché à Saint-Nicolas-des-Chàmps, par un religieux jacobin, qui exposa « en quel inconvenient de conscience s’estoient mis ceulx qui avoient fait ung libelle diffamatoire. » Suivant le compte du receveur de Saint-Martin-des-Champs[2], auquel nous empruntons ces détails, après le sermon le prieur de Saint-Martin fit offrir une collation au prédicateur « en attendant le disner, en l’ostel du Gros Tournois, devant l’église de Sainct Nicolas. » Toutes ces particularités, qui ne présentent à nos yeux qu’un intérêt très restreint, avaient une tout autre importance dans le milieu où vivait un homme d’église du xvie siècle. Pour le curé de Saint-Nicolas-des-Champs, l’apposition d’un libelle diffamatoire dans son église, le sermon prêché par ce jacobin, étaient autant d’événements de nature

  1. Arch. nat., S 3453.
  2. Arch. nat., LL 1383, fol. 130 r°, 159 v°.