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le Dôlois l’animait par des couplets peu tristes. Des chansons, elle vint à des discours moins calmes, puis à la colère : elle nous apostropha les uns après les autres, et paraissait furieuse contre le garçon d’auberge de Joigny, qui nous avait appris qu’elle était entretenue par un ci-devant marquis dont je dois taire le nom ; elle se reprocha ensuite ses égaremens, et se mit à pleurer : nous essayâmes de la tranquilliser. Le sommeil, heureux sommeil, qui vient au secours des infortunés, s’empara de ses sens : nous parlâmes bas, pour ne pas troubler un repos que nous crûmes lui être nécessaire.

Qu’elle était belle, cette malheureuse fille, dans ce moment de calme ! Nous plaignîmes son sort infortuné, et le trouble dans lequel elle passe bien des instans. Mad. B…, dont l’ame était naturellement sensible, paraissait plus vivement touchée de la situation de cette jeune personne. Puisse hélas !