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NOUVELLES ET MÉLANGES.

de fer, grâce au double sens de « pain » et de « combat » qui est propre au mot לֶחֶם, symbolisait l’épée de Gédéon qui appartenait à une famille peu distinguée (loc. cit., vi, 15 ) ; la chute irrémédiable de la tente centrale prédisait la défaite du chef madianite avec toute son armée (loc. cit., vii, 14). On peut discuter la date ou la valeur historique de cette narration, mais son unité rédactionnelle, contrairement à ce que pense la critique moderne, est à l’abri du moindre doute.

II

Les poètes hébreux se servent parfois d’expressions qui frisent un réalisme assez piquant ; le chapitre xvi d’Ézéchiel offre un fameux échantillon de ce genre. Je veux appeler l’attention sur deux passages appartenant à d’autres prophètes et contenant une description des procédés des fonctions corporelles en rapport avec la nutrition. Le premier passage (Jérémie, li, 34) n’est bien compris que lorsqu’on l’envisage à ce point de vue. Nabuchodonosor y est représenté comme un géant dévorant un agneau qui est Israël. C’est la victime elle-même qui décrit les phases des transformations chimiques par lesquelles elle a passé :

אֲכָלַנִי הֲמָמַנִי נְבוּכַדְרֶאצַר מֶלֶךְ כָּבֶל הִצִינַנִי כְלִי רִיק בְּלָעַנִי כַתַּנִּין מִלָּא כְרֵשׂוֹ מְעֲדָנַי הֲדִיחַנִי « Nabukudrussur, roi de Babel, m’a mangé (manducation), m’a broyé avec bruit (mastication), m’a placé comme un vase vide (réduction en squelette), m’a avalé comme un monstre (déglutination), a rempli son ventre de mes meilleurs sucs (absorption), (puis il) m’a rejeté (expulsion) ».

Le second passage (Michée, vi, 14) a été entièrement méconnu par les commentateurs modernes ; il porte :

אַתָה תֹאכַל וְלֹא תִשְׂבַּע וְיֶשְׁחֲךְ בְּקִרְבֶּךְ וְתַסֵג תַפְלְיט וַאֲשֶׁר תְּפַרַב אָתֵּן