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glais, et chacune des langues d’Europe soumises à leur curiosité. Passant ensuite du vocabulaire à la grammaire, de la partie matérielle des langues à leur génie, vivifiant et spécial, ils en étudieraient les différences avec d’autant plus d’intérêt, qu’une analogie commune leur servirait de base. Ils poursuivraient celles des ramifications qui leur offriraient le plus de charmes ; mais ils ne pourraient jamais fixer leur attention sur un seul point, sans qu’une foule de rapports ne se réveillassent en même temps dans leur pensée, et ne leur montrassent des routes ouvertes devant eux vers toutes les langues et toutes les littératures. Tel serait l’avantage d’une méthode synglossique substituée à l’étude, pour ainsi dire exceptionnelle, de notre temps ; et si nous osons hasarder ici cette opinion, à laquelle notre inexpérience ne nous donne que peu de droits, nous ne le faisons que sous l’égide d’autorités imposantes qui ont émis ce vœu avant nous, et sur-tout sous celle d’un homme dont les sciences, les lettres et l’humanité déplorent vivement la perte récente, et qui, sous le voile modeste de l’anonyme, a su donner depuis dix années un élan prodigieux à l’étude de la linguistique dans toute l’Europe. La propagation de la connaissance des langues, qui se rattachait dans son esprit au but si bienfaisant de la paix générale des nations, était une des théories favorites de cet homme de bien, qui joignait à un génie supérieur la plus noble et la plus active philanthropie : c’est assez désigner à ses nombreux amis le savant et respectable M. de Merian.