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NOVEMBRE-DÉCEMBRE 1903.

Petit Véhicule de langue sanscrite, perfectionnée dans le sens idéaliste par les Vijñânavâdins ; — nous ne parlerons plus des hypothèses historiques qu’elle soulève ; — mais, délaissant les Suttantas et leurs auteurs anonymes pour les écrits signés du Bouddhisme postérieur, nous interrogerons les docteurs mâdhyamikas qui donnèrent au Grand Véhicule son caractère le plus original en reconnaissant, non seulement le néant de Yâtman (pudgalaçûnyatâ), mais encore le néant des skandhas[1], c’est-à-dire des éléments constitutifs de la série que l’ancien Abhidharma avait substituée à Yâtman [skandha ou dharmaçûnyatâ.) Ils nièrent, au point de vue de l’enseignement vrai, la doctrine de l’acte et de la rétribution ; ils furent par là même amenés à mettre au premier plan et à renouveler le problème de la vérité vraie et de la vérité relative[2].

  1. Les Anciens reconnaissent l’existence des skandhas (Kathàvatthu, xix, 2).
  2. La question des deux vérités ne se pose pas dans les mêmes termes pour le Petit Véhicule et pour le Grand (Mâdhvamikas). Une certaine confusion résulte du fait que le mot samvrti (sammuti) a pris une valeur nouvelle dans la langue des Mâdhyamikas.

    Le Petit Véhicule croit qu’il y a des dharmas, des skandhas ; il croit que l’expérience (vyavahâra) est vraie. On oppose deux vérités, la vérité vraie (il n’y a que des dharmas momentanés) et la vérité dite de samvrti (il y a un pudgala, un âtman). Cette dernière est fausse, entièrement fausse, n’étant qu’une interprétation inexacte de l’expérience ; on peut la dire « vérité », parce qu’elle est admise dans le monde, parce qu’elle est utile et que le Bouddha s’en est servi. On distingue deux enseignements de Bouddha : l’enseignement conforme à la vérité (tattvârthâ, pàramârihikâ) [nairâtmya, pratîtyasamutpâda, karmaphala] ; l’enseignement provisoire et des-