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NOVEMBRE-DÉCEMBRE 1911.

que les palais du soleil et de la lune[1], et aussi les huit terres en dessous, les trois vêtements[2] et les trois roues[3], et même

    tion un peu ambiguë ; nous reviendrons sur cette question à propos des « vaisseaux ».

  1. Les « palais » ([texte chinois] kong) du soleil et de la lune reparaissent à deux reprises dans la deuxième section du Khuastuanift : « Pour le dieu du soleil et de la lune et pour les dieux assis dans leurs deux palais (ordu) lumineux » (cf. von Le Coq, Khuastuanift, p. 283-284).
  2. [texte chinois] san yi. Les « trois vêtements » reparaissent dans un texte pehlvi de Tourfan (Müller, Handschr., 89) : « Puis, par la même purification, il habilla le dieu du soleil (mîḥryazd) de trois vêtements (pêmôg seh), qui sont le vent, l’eau et le feu. » M. Müller avait rendu un peu plus librement pêmôg par « enveloppe » (Hülle) ; notre texte montre qu’il vaut mieux laisser au mot son sens propre. Le mot « vêtement » a d’ailleurs été adopté pour cette phrase par M. Salemann (Manich. Stud., I, 50), qui traduit : « Puis, par cette même purification, Mihr-yazd fit trois vêtements, de l’air, de la terre et du feu. »
  3. [texte chinois] san louen. Les « trois roues » sont connues par saint Augustin, Contra Faustum, xv, 6 : « tres rotas ... ignis, aquae et venti », et xx, 10 : « rotas ignium, ventorum et aquarum ». Notre texte confirme ce témoignage, et met hors de doute que, dans le passage correspondant de Théodore bar Khôni (Pognon, Inscriptions, p. 189-190), il faut bien, comme le croit M. Cumont (cf. Cosmogonie, p. 31), traduire agānā par roue, ou au plus par orbe, mais non par vase. Théodore bar Khôni (Pognon, Inscriptions, p. 190) parle de l’ascension, de la montée des trois roues. M. Cumont {Cosmogonie, p. 32, 37-38) a justement rapproché de ce passage trois phrases des textes pehlvi de M. Müller (Handschr., p. 17, 19, 42) où il est question du vent, du feu, de l’eau et de leur ascension. Mais l’action des trois « roues » n’en reste pas moins assez obscure. M. Cumont admet (Cosmogonie, p. 33) qu’il y a là un souvenir « des sphères concentriques des éléments, eau, air, feu, qui, suivant les stoïciens, entourent la terre placée au centre de l’univers ». C’est en effet très possible, mais la conception avait certainement beaucoup dévié, et ni les rotae de saint Augustin, ni les louen du chinois ne peuvent s’interpréter normalement par « sphère ». Enfin on doit se demander en quoi les « trois roues » diffèrent des « trois vêtements » ; jusqu’à présent, nous n’en savons lien. Il se pourrait, à la rigueur, qu’au lieu de comprendre « les trois vêtements et les trois roues », on dût considérer les deux termes comme dépendant l’un de l’autre et dire : « les trois roues des trois vêtements » ; nous ne le croyons pas. Provisoirement, voici l’explication que nous supposons. Les trois « vêtements » seraient ces « matelas » ou ces « lits » dont parle Théodore bar Khoni (Pognon, Inscriptions, p. 189) ; M. Cumont (Cosmogonie, p. 83) propose d’y voir des séparations constituées par le vent, le feu et l’eau, qui « doivent empêcher les habitants des cieux d’être brûlés par le poison des archontes ». Peut-être touchons-nous là à