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monde, qui a précédé toutes les antres dans la carrière de la civilisation. On y prend involontairement cet intérêt qui inspire tout ce qui a pu concourir à l’amélioration des mœurs au développement des esprits, tout ce qui a contribué à policer les hommes, et à leur donner le goût des travaux paisibles. Peut-être se mêle-t-il aussi une judicieuse curiosité, quelque chose de ce plaisir que l’on goûte à contempler les erreurs des autres, et des travers dont on se sent exempt. Le spectacle des folies humaines n’est pas entièrement perdu pour les esprits méditatifs, et comme toutes les nations plongées dans les ténèbres de l’idolâtrie, se le sont alternativement donné les unes aux autres, l’innocente satisfaction qu’il procure est une de celles dont on doit le moins craindre de voir tarir la source.

La religion samanéenne, une des plus célèbres de l’Asie orientale, présente, peut-être à un plus haut degré que toute autre, ces divers avantages réunis. Ceux qui l’ont instituée étaient de ces sages de l’antique Orient, qui aimaient à s’exprimer par énigmes et par symboles, qui dédaignaient de dire raisonnablement des choses raisonnables, et qui, pour rien au monde, n’auraient voulu émettre une vérité, sans l’avoir préalablement déguisée en extravagance. Quelques dogmes très-ingénieux, une morale assez épurée, pouvaient recommander le Bouddhisme auprès des hommes sensés ; mais des fables absurdes devaient surtout lui faire trouver grâce aux yeux du vulgaire. Le système mythologique le plus embrouillé qui soit né en Asie, s’y trouve combiné avec des subtilités métaphy-